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Témoignage d'Isabelle CHIASSON.


Responsable de communications et de projets internationaux pour la Firme de consultants Landal Inc. de Moncton, Isabelle Chiasson a fréquenté l'Université Libre de Bruxelles et l'Université de Poitiers en France. A vécu de nombreuses expériences sur le plan international. En 1999, a été représentante du Nouveau-Brunswick au sein de la délégation des jeunes internationaux au VIIIe Sommet de la francophonie à Moncton, au Forum jeunesse francophone international à Ouagadougou, à la Concertation internationale des jeunes francophones à Bamako et au Grand rassemblement de la jeunesse francophone de Genève, en Suisse. A représenté le Canada atlantique à une conférence sur la jeunesse et la coopération à Jakarta, en Indonésie. A aussi œuvré comme représentante du Canada à la rédaction de la Convention des droits de l'enfant adoptée par les Nations-Unies à Dakar, au Sénégal, en 1989.


J'ai fait partie du Comité organisateur des IVes Jeux de la Francophonie d'Ottawa-Hull qui sont terminés. Je ne suis pas venue vous donner un témoignage du succès des Jeux, mais bien un témoignage de ma réalité à moi et de la façon dont je vis ma francophonie ou ma francité, sur la vitalité qui m'anime et les raisons pour lesquelles je travaille en francophonie.


Pour comprendre mon témoignage, il faut bien comprendre d'où je viens. Je suis originaire d'un petit village dans le nord-est du Nouveau-Brunswick et, jusqu'à dix-huit ans, j'ai habité dans le petit village de Petit-Rocher. J'ai ensuite fait des études en communications à Moncton, dans le sud-est du Nouveau-Brunswick. Puis j'ai quitté Moncton pour l'Université Laval, par la force des choses mais aussi parce que j'avais le goût de voir ailleurs, je suis donc allée à Québec pour terminer mes études.


Je pense que je suis issue d'un milieu familial intéressant parce qu’il m'a incitée à continuer dans la même voie que lui. C'est un milieu familial très revendicateur et très militant envers la langue française au Nouveau-Brunswick, dans la province et dans notre petite communauté. Ma famille a milité sur le plan politique puis sur les plans culturel et économique. Ce qui m'a certainement montré, lorsque j'étais très jeune, l'importance de la langue française, et montré qu'on devait la sauvegarder et lui porter beaucoup d'attention.


C'est sans doute ce milieu-là qui à mon avis m'a donné cette confiance de pouvoir le quitter, d'étudier à l'extérieur du Nouveau-Brunswick, et plus tard de venir m'installer à Ottawa. Quand je dis un milieu militant c'est aussi tout ce qui l'entoure. On n'a pas besoin de militer très fort, en Acadie, pour que les jeunes sentent qu'ils font partie d'un milieu minoritaire. Tout à l'heure on parlait, je veux simplement reprendre les termes que mes collègues ont utilisés, de milieu minoritaire, de défense, de exogamie, de transfert linguistique et de lutte. Ce sont tous des termes souvent utilisés, autant par le milieu associatif que par les francophones, pour décrire leur situation. Ce ne sont pas des termes très attrayants pour les jeunes francophones qui ne comprennent peut-être même pas ce qu'est l’exogamie. Ce contexte-là, dans le fond, ne m'animait pas, parce que j'étais consciente de la réalité, j'étais convaincue, je suis convaincue que cette langue-là nous apporte autre chose. Et c'est pour cela que j'ai envie de vous parler de la découverte que j'ai faite de la Francophonie internationale.


J'ai pu partir d'un fondement très solide que m'ont procuré le milieu associatif et le milieu politique. Je me suis rendu compte que la langue française pouvait être utilisée à d'autres fins et pour découvrir autre chose. Pour moi cela a été la Francophonie! J'ai eu la chance de travailler dans divers milieux en Francophonie. J'ai eu de la chance, parce que je me sens très privilégiée de l'avoir fait. Tous les jeunes en Acadie n'ont pas eu cette chance-là. Ce qui m'a donné cette nouvelle ouverture, c'est de me rendre compte que je pouvais utiliser la langue française non seulement avec ma propre communauté, les gens au Nouveau-Brunswick ou les francophones au Canada, mais que je pouvais l'utiliser avec des gens qui venaient d'autres pays et qui partageaient la même langue que moi. C'est un privilège, mais c'est aussi une découverte, parce que tous les Acadiens ou tous les francophones du Canada ne se sentent pas à l'aise dans ce forum-là. Pour moi, cela a été tout à fait extraordinaire de pouvoir aller dans des concertations internationales en francophonie et de m'asseoir à côté d'un Togolais, d'un Québécois et d'un Vietnamien qui vivent des réalités tout à fait différentes, mais avec qui nous partions sur un pied d'égalité, celui du partage de la même langue.


En conclusion, je dirais que si on arrive à démontrer aux jeunes que l'utilisation de la langue française n'est pas seulement rattachée à des concepts politiques ou logistiques, mais qu'elle peut être la porte d'entrée vers autre chose, je pense que le positivisme pourra s'installer chez les jeunes et c'est très important pour qu'ils accrochent. Quand on se plaît dans la discussion de la défense et de la lutte, etc., les jeunes se sentent un peu étouffés. Je suis fière de pouvoir discuter sur ce sujet avec vous parce que cela prouve que je suis à l'aise dans ma francité et dans ma vitalité. La seule façon de pouvoir communiquer sa vitalité à quelqu'un est de le faire dans sa langue. C'est une chance pour moi de pouvoir le faire en français, puisque c'est la seule façon dont je veux le faire. La langue française a été pour moi le moyen de véhiculer la vitalité de ma communauté francophone au sein de la communauté acadienne. Je l'ai fait aussi au sein de la Francophonie internationale. Je pense que c'est tout un privilège. Merci.