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Michel PERRIN


Université de Bordeaux II
Chef du département des langues vivantes pratiques Concepteur de VIFAX


L’expérience de VIFAX



VIFAX repose sur l’utilisation pédagogique du support que tout le monde peut recevoir chez soi : la télévision. VIFAX est né en juillet 1989, à partir du constat que la BBC britannique se mettait sur un satellite, qu’on allait donc pouvoir recevoir ses émissions partout en France, comme on recevait déjà par le même moyen les émissions nord-américaines. À cette date, nous nous sommes dit qu’il était inconcevable que la France reçoive tous les jours les télévisions britannique et américaine et qu’on n’utilise pas ce canal pour des fins pédagogiques. Nous avons donc conçu VIFAX.

Tous les jours, le matin, à partir du journal télévisé du jour, une équipe pédagogique fabrique une batterie d’exercices sur ordinateur. Puis, vers midi, elle envoie ces exercices aux destinataires abonnés. La responsabilité technique de ces derniers étant d’enregistrer le journal télévisé, bien entendu.

À l’époque nous utilisions la télécopie, le fax. D’où VIFAX, la VIE de la langue par le FAX. Les utilisateurs, individuels ou sous la direction d’un professeur, peuvent donc, dès l’après-midi, travailler sur deux séquences de 2 à 3 minutes que nous avons sélectionnées. Nous « didactisons » ces séquences, pardonnez-moi le néologisme, et c’est cette « didactisation » que nous adressons à nos abonnés.

VIFAX existe en anglais depuis 1989, en allemand depuis 1995, et en français, à la demande de l’Agence de la Francophonie, depuis janvier 1997.

VIFAX peut être reçu de quatre manières :

Pour la francophonie, il faut souligner que nous utilisons, via TV 5, les journaux télévisés de cinq chaînes francophones : deux chaînes françaises, FR2 et FR3, la chaîne québécoise, celle de la Suisse romande et celle de la Belgique francophone. Cinq jours par semaine, une chaîne par jour.

Les abonnés reçoivent trois feuilles pour chacune des deux séquences. La première feuille comporte quatre exercices.

Le premier exercice a pour objectif d’aider l’apprenant devant ce que j’appelle « l’effet d’avalanche ». Quand on reçoit une avalanche d’informations dans une langue étrangère qu’on maîtrise mal, on ne comprend rien. Il faut donc préparer la compréhension en fonction du principe : « on ne comprend que ce qu’on attend ». On propose donc des points d’ancrage qui focalisent l’attention sur « ce dont il va s’agir ». La compréhension est un processus qui ne s’enseigne pas. C’est un processus qui vient de l’apprenant, qui est individuel. Mais nous pouvons l’aider à construire cette compréhension.

Le deuxième exercice déconstruit des informations données dans la séquence du journal et demande à l’apprenant de les reconstruire à partir d’un choix proposé.

Exercice suivant : même chose, mais plus fin, plus détaillé. On utilise ici la technique du «comblement du manque », l’information gap, technique mise au point par les anglophones.

On aboutit enfin à un point précis de langue — lexique, grammaire, expression idiomatique — sur lequel est effectué un travail de pratique raisonnée et de production langagière associée à des situations culturelles.

Résumons : focalisation, compréhension globale, compréhension plus détaillée et manipulation de la langue avec ouverture culturelle.

Les sujets traités sont extrêmement variés. Nous avons une base thématique, une banque de données qui regroupe et classe tous les sujets traités et permet de retrouver facilement un sujet précis, quel qu’en soit le thème. L’ensemble est très riche puisque VIFAX français en est au numéro 110, et VIFAX anglais au numéro 1015.

Une deuxième feuille accompagne la feuille d’exercices : elle donne les corrigés. Son utilisation dépend évidemment de la situation : apprenant individuel ou classe.

Enfin une feuille numéro 3 donne la transcription intégrale de la séquence. Elle porte des mots clefs qui servent à l’indexation. Revoir la séquence avec la transcription produit le phénomène de « la lumière soudaine ». Autour des noyaux compris dans le texte tombe en place le reste, tout ce qui, sans la préparation et le travail, aurait submergé l’apprenant.

Conclusion : le processus d’accélération de la compétence de compréhension de la langue orale étrangère se met en place avec un travail de ce type. Il faut bien entendu qu’il soit conduit avec régularité. D’où la régularité de VIFAX : cinq jours par semaine, trente semaines dans l’année.

[L’exposé de Michel Perrin a été accompagné de nombreux documents télévisuels. Nous donnons ici un résumé de son intervention.]