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Message de M. Stelio FARANDJIS

Secrétaire général du Haut Conseil de la Francophonie


lu par Mme Monique Pontault

Chargée de mission


Vos Excellences,

Mesdames, Messieurs,


C'est avec joie que je salue votre réunion qui rassemble des personnalités si nombreuses et si brillantes.

Ma joie est d'autant plus grande que j'éprouve pour votre président, Monsieur Roland Eluerd, des sentiments d'amitié et d'admiration.

Je tiens par ailleurs à saluer les responsables de la vie politique et universitaire du Burkina Faso et à adresser mes salutations et mes encouragements à M. Edmond Jouve. Cet universitaire, grand ami de l'Afrique, a rassemblé, depuis une dizaine d'années, la fine fleur de la Francophonie internationale dans ses rencontres au cœur d'une des plus belles régions de France. Le couronnement de son action inlassable sera sans doute la rencontre qu'il organise l'année prochaine, ici même, à Ouagadougou.

Enfin, ma joie est complète puisque je suis profondément attaché au peuple burkinabè.


On ne dira jamais assez combien une langue à la fois rigoureuse et savoureuse est importante pour bien penser et pour bien sentir. Quand on entend dire qu'il suffit d'une pseudo langue internationale, réduite dans sa syntaxe et dans son vocabulaire, pour exprimer les mille nuances de la pensée et les mille finesses du sentiment, on peut être à la fois révolté et avoir la volonté ferme de réagir. Heureusement, la Francophonie est bien vivante, comme le sont certaines aires linguistiques qui composent la richesse de l'humanisme pluriel.


Pour ce qui est de la Francophonie, sa force vient notamment de la vitalité de la Francophonie africaine. Dans les dix dernières années le français a fait des progrès fulgurants en Afrique et en particulier dans la jeunesse du Burkina Faso. Nous l'avons écrit dans notre dernier Rapport sur l'état de la Francophonie dans le monde et j'ai pu moi-même le constater lors de mes discussions passionnantes avec des jeunes citoyens de la grande métropole qu'est devenue Ouagadougou.


Il convient aussi de saluer particulièrement la montée d'une génération de juristes africains et il est regrettable qu'une certaine presse, légitimement préoccupée des atteintes aux droits de l'Homme, n'ouvre jamais le dossier de la coopération juridique et judiciaire menée par l'Agence intergouvernementale de la Francophonie, par l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, par l'Institut de droit d'expression et d'inspiration françaises, par les organisations professionnelles de magistrats et d'avocats.


En effet, il s'agit là d'un phénomène majeur, même si les médias n'en parlent pas suffisamment, car il faut rappeler qu'il ne suffit pas de maîtriser une langue partagée internationalement comme la langue française pour appartenir à une véritable famille, par l'esprit et par le cœur, encore faut-il avoir un langage commun.

Pour cela il convient de se mettre d'accord sur les questions fondamentales qui concernent l'avenir de nos sociétés. Ainsi doit-on affirmer que les droits de l'Homme, la démocratie, l'État de droit, ne tolèrent aucune exception que pourraient justifier, par exemple, l'insuffisance du développement économique ou l'existence de périls sécuritaires. Mais cela étant dit, la culture démocratique ne s'acquiert pas en un jour et il est bon de rappeler, à cet égard, que sept siècles se sont écoulés entre l'éclosion des communes libres en France et la proclamation des Droits de l'Homme de 1789.


Aussi, contrairement à certaines thèses qui sont constamment ressassées, et en particulier dans certains milieux nord-américains, est-il nécessaire de préciser que les droits juridiques et politiques individuels, si indispensables qu'ils soient, ne suffisent pas. En effet, il faut affirmer la nécessité complémentaire de satisfaire les droits des peuples à la sécurité, au développement et à la santé.


Si la liberté de produire, la liberté d'entreprendre, la liberté de créer, la liberté d'échanger, la liberté de vivre en citoyen libre sont des droits fondamentaux, il est indispensable également d'affirmer l'urgence des principes de solidarité sans lesquels les handicaps, les inégalités ne pourront être ni corrigés ni surmontés.


Où est la liberté des malades du sida, privés de l'accès aux soins et aux médicaments, même s'ils ont le droit de vote ou de réunion ? Où est la liberté du travailleur guatémaltèque, qui travaille au service de l'un des trois grands trusts américains présents dans son pays, pour un salaire de misère cinquante fois moins élevé que celui d'un ouvrier martiniquais ? Et où est la liberté d'un Martiniquais qui voit son emploi menacé parce que le prix de la banane martiniquaise s'effondre ? Il ne faut pas seulement parler des droits de l'Homme mais aussi des droits de l'humanité.


Disons-le clairement, la survie de l'espèce humaine ne sera assurée que grâce au désarmement général dans la sécurité collective et grâce aussi au développement harmonisé, respectueux des identités culturelles comme de l'environnement écologique.


Désormais, sur la scène internationale, la bataille fait rage au niveau des concepts et des notions autour desquels la civilisation universelle va s'organiser. Il est par conséquent indispensable de défendre la notion de droit écrit et, en même temps, de défendre la conception humaniste du droit qui n'oppose pas les droits individuels aux droits collectifs et qui met au-dessus de tout le droit à l'école, le droit à la santé, le droit à la vie.





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