Biennale de la Langue Française

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Oumar KANOUTE

ENSUP/FLASH Université du MALI, Bamako


Place et Représentation de la Justice dans le Théâtre africain contemporain


En jetant un regard sur le répertoire du théâtre africain contemporain d'expression française, on constate une abondance de titres ayant pour référentiel la justice.

Les Dieux trancheront; Le jugement suprême; Le procès de Dieu; L'Europe inculpée; À quand le Procès ?; Le Procès du Pilon; Le procès de Lat Dior, etc.

On parle de théâtre contemporain parce qu'il existe un théâtre traditionnel dont la fonction essentielle était la défense des valeurs morales, la préservation des institutions religieuses et socio-culturelles de la communauté. Ce théâtre est aussi ancien que la société africaine elle-même.

Le théâtre contemporain, lui, a été inventé à l'école et sous la colonisation. Il est fortement tributaire de l'Occident.

La coexistence de ces deux formes de théâtre consacre la formation de deux publics et illustre le clivage entre une culture populaire vécue par les masses et une culture destinée à un groupe restreint, celui des Africains qui ont été à l'école des Blancs (p. 36 Bernard Mouralis).

Ce sont les grandes préoccupations de ce groupe que le théâtre africain contemporain met en scène.

Le colonisateur en dominant l'Africain a cherché à le "civiliser" en l'obligeant à changer de droit. Or le Droit est le produit de l'ensemble des croyances, des mentalités, des us et coutumes d'une communauté. Ce changement de structure sociale affecte sérieusement la conscience de l'intellectuel africain qui se demande à quelle justice se fier.

La justice est le principe de la mise en place d'un système qui permet à l'individu de jouir de tout ce qui lui est dû à condition de respecter les règles régissant la vie de la communauté.

Ce sont les libertés de l'individu qui au sein de cette communauté sont limitées et garanties c'est-à-dire transformées en droits.

La justice exprime donc un ordre pré-établi, public, social ou économique qui sous-tend les rapports tant des hommes que des collectivités entre eux. Elle se traduit par l'harmonie qui doit conditionner toute vie normale en société et assurer l'équilibre des valeurs (Ahmadou N'DIAYE p. 17).

Lorsque cet ordre est troublé, il s'ensuit une réaction tendant à neutraliser l'auteur de l'infraction et à rétablir l'équilibre. Mais, pour l'intellectuel africain, de quel ordre s'agit-il ? L'ordre traditionnel ou l'ordre né de la colonisation ?

Le théâtre africain contemporain par la satire sociale, l'investigation historique, la critique des mœurs politiques, tentera de répondre à ces interrogations.

A travers le tribunal des dieux, le tribunal des humains ou le tribunal de la postérité, le théâtre contemporain représentera la justice sous la forme d'un conflit entre les barrières multiples érigées par l'ordre social en place et la liberté de l'individu qui aspire au changement .


La justice des dieux ou la révolte contre l'ordre traditionnel

« Le monde a bien changé, autrefois on n'avait pas besoin d'un tribunal - lorsqu'on était responsable d'une infraction, on vous invitait tout simplement à "ouvrir la calebasse" » (Tableau p. 45).

Ainsi s'exprimait avec regret Le vieux appelé à témoigner à la barre dans Le procès du Pilon. La calebasse dont il est question, c'est la calebasse de poison.

Dans la société traditionnelle en effet, chaque fois qu'un individu transgressait les règles, il était puni de mort ou de bannissement. Les divinités, vigilantes, jugeaient le comportement des humains et tranchaient par l'intermédiaire des prêtres et devins intercesseurs. L'ordalie était le mode privilégié d'accès à la justice.

Cette façon de régler les conflits sera jugée rétrograde et obscurantiste par les intellectuels colonisés qui se faisaient appeler à l'époque "les évolués". Leur théâtre se fera largement l'écho du drame de l'individu affronté aux dieux.

L'École William Ponty avec Le retour aux fétiches délaissés et Sokamé des élèves dahoméens, les Centres culturels avec L'appel du Fétiche de Moctar Fofana et Sarzan une adaptation du conte de Birago DIOP par Lamine DIAKHATE nous proposent des solutions susceptibles d'être adoptées face à la question.

Dans Le retour aux fétiches délaissés, une série de malheurs s'abat sur Dassi, un riche notable de Porto-Novo. Son fils tombe malade, sa femme est mordue par un serpent, ses récoltes ne se vendent plus. Azombonon le Chef-féticheur lui apprend que ce sont les fétiches qui sont fâchés parce qu'il les a abandonnés. Dassi accepte de faire des sacrifices. Azombonon implore pour lui la divinité :

«O fâ, dieu de la sagesse, la vérité personnifiée, viens prendre tes offrandes et laisse en échange dans la maison de la paix».

Le génie du mal est alors écarté de la famille de Dassi.

L'équilibre un moment rompu est de nouveau rétabli. La justice des dieux a appliqué ici la responsabilité collective en frappant les proches du coupable. L'intercession du féticheur permet de régler le différend. La parole remplace la force brutale, la persuasion l'acte de vengeance, violent et expéditif. Les dieux courroucés sont capables de pardon et de tolérance.

Dans Sokamé, une terrible sécheresse frappe la contrée.

Dans cette société tout a une cause. Pour faire descendre la pluie, une vierge doit être sacrifiée au dieu-fétiche de la pluie. Le choix tombe sur Sokamé, la fiancée de Agblemakou.

Sokamé, qui aurait dû s'honorer de ce choix, demande à son fiancé de la sauver.

Agblemakou consulte le fétiche Ogou. Son prêtre, le bokono, lui remet le poignard-emblême du fétiche.

Agblemakou tue le Serpent. Alors que le prêtre de l'animal-dieu crie au sacrilège et à la mort en prédisant une sécheresse encore plus implacable, la pluie tombe.

Nous sommes dans la tradition mais la pièce montre une société qui bouge. L'élément nouveau, c'est le mariage d'amour. C'est lui qui est à l'origine de l'infraction. En matière pénale, l'infraction est définie comme une action ou une omission qui porte atteinte à l'ordre public et lèse un intérêt privé. L'infraction, c'est ici le refus de laisser sacrifier la jeune fille et le meurtre du dieu-fétiche. Cette infraction lèse le peuple que menace une terrible sécheresse. La sentence aurait dû être la mort pour l'auteur du crime. Mais les dieux en décident autrement.

La pièce remet en cause l'idée d'une société traditionnelle homogène, idéale et idyllique.

Les divinités sont divisées en dieux du bien et dieux du mal.

Agblemakou affronte le génie des eaux. L'humain triomphe du dieu mais avec la bénédiction d'autres divinités.

« Je crois qu'avec ce poignard la protection du fâ, et l'aide des fétiches de mes ancêtres, je vaincrai tous les obstacles ».

Les élèves dahoméens de Ponty présentent une société qui se transforme en se débarrassant des pratiques coutumières obscurantistes, pour prendre la voie du progrès.

Dans Le retour aux fétiches délaissés et Sokamé,tous les personnages appartiennent à l'univers traditionnel. L'appel du Fétiche et Sarzan mettent en scène le personnage de l'évolué aux prises avec les fétiches.

Dioman de L'appel du Fétiche est un jeune commis expéditionnaire qui veut aller en congé au village. Son père se réjouit de son arrivée car ce sera l'occasion de l'initier au Fétiche.

Dioman qui a été à l'école européenne ne veut plus se fier à ces pratiques superstitieuses. Le père de Dioman souhaite que son fils lui succède à la tête du Canton mais il craint que ses administrés ne se détournent d'un chef qui n'a pas subi l'initiation. Dioman ne dispose cependant que de trois mois alors que l'initiation doit durer sept ans. Pour ne pas faire souffrir ses parents, Dioman capitule. Mais les Fétiches se montreront magnanimes. Par la bouche du féticheur Soma, ils se prononcent : « Dioman est un brave garçon. Par sa conduite, sa politesse et ses largesses, tout le village a pour lui de l'estime. Les fétiches même attendaient cette occasion pour le féliciter et aussi pour le remercier publiquement des dons qu'il leur a faits à maintes reprises » p. 94.

Lat DIOR accorde une dérogation spéciale. Pour Dioman sept jours suffisent pour l'initiation. L'ordre établi est de ce fait préservé. Le mode de règlement appliqué ici est de ce fait préservé. Le mode de règlement appliqué ici est le compromis.

Sarzan est l'histoire du Sergent Thiémoko KEITA qui revient dans son village après quinze ans d'errance. Il veut "civiliser" ses frères en détruisant leurs traditions qualifiées de "manières de sauvage". Il se heurte à l'hostilité d'un monde multiséculaire et qui ne veut pas mourir. Les mots et les génies se vengent des offenses de Thiémoko KEITA. Les dieux se font justice. L'équilibre pertubé est de nouveau restauré.

Dioman et Sarzan sont des évolués. L'un est commis, c'est-à-dire un auxiliaire de l'Administration coloniale, l'autre un Tirailleur sénégalais. C'est-à-dire que le temps de l'histoire, c'est la période coloniale, une période de pleine transformation.

L'ordre traditionnel est en train de se défaire. Ses valeurs morales et religieuses, ses croyances sont attaquées de toutes parts mais le nouvel ordre social n'a pas fini de se constituer. La tension est très vive entre la volonté de l'évolué de détruire les coutumes désuètes et le jugement de la communauté qui condamne cette tentative de liberté.

Dioman et Sarzan ne croient pas aux fétiches. L'un et l'autre souhaitent la mort des dieux. Cependant dans L'appel du Fétiche comme dans Sarzan les révoltes individuelles se terminent par des défaites. (Dioman avait juré qu'il n'accepterait jamais l'initiation, il finit par s'y plier. Sarzan avait juré d'en finir avec les manières de sauvage, il devient fou et se rallie à l'Afrique mystique.)

Il faut cependant se garder de voir en cela une apologie du passé. Les dieux victorieux sont déjà condamnés par la raison cartésienne à laquelle l'évolué a été formé.

Moustapha CISSE illustre bien cette position de l'intellectuel colonisé quand il suggère aux Centres culturels de choisir des thèmes éducatifs tels que la lutte contre certaines barrières sociales et de donner des représentations types où seraient conviés les délégués des diverses associations, voire les notables et certains chefs coutumiers.

« Sans heurter de front certains préjugés encore vivaces dans le milieu africain, ces démonstrations ressortiraient habilement l'absurdité des ces pratiques désuètes en montrant la puérilité et le ridicule de leur existence ».

L'évolué cherche en fait à mériter le respect du monde. Il est en quête d'une certaine universalité. C'est ce que soutient Abdou Anta Kâ dans un article intitulé Passé et présence du Théâtre africain.

Le théâtre selon A. A. Kâ n'a pas pour mission de prouver que l'Africain est un être mais d'affirmer que l'Africain est un homme en universalisant en lui l'Homme.

« chaque race africaine , écrit-il, possède une mythologie propre à elle, pleine de richesses métaphysiques où le sentiment du Bien et du Mal s'affrontent, où des hommes sont en lutte avec la Nature, avec eux-mêmes, où le Beau a une place considérable et se révèle même une divinité » (p. 66).

Le théâtre doit donc aller à la recherche de valeurs absolues. Parce qu'il vit une période transitoire, l'évolué doit réserver, dans ses œuvres, les richesses essentielles de son peuple afin qu'elles ne périssent pas.

Il nous en donne l'exemple avec La fille des Dieux. Mahdi et Awa sont bannis parce que leurs parents sorciers ont été tués par le village. Mais le village ne connaît plus la joie. "Dans le vol des oiseaux, les sages ont lu les signes de la fin". Les fleuves ont commencé à tarir. La grosse pierre blanche est devenue toute noire. Les sages ont alors convié la foule au repentir collectif. En vain. Seule une jeune fille proscrite élevée au rang de reine sauvera le village du péril. Ce village profondément croyant s'est dévoyé. Il ne connaît plus l'enfant nu et le mendiant.

Le village qui a proscrit des enfants de sorciers est en fait un village de sorciers parce qu'il est sans pitié pour les enfants orphelins, et les sages traitent les fils d'autrui de fils de peu.

Le village est donc puni.

Face à ce drame Mahdi et sa sœur n'ont pas la même position.

Mahdi veut que le village sombre.

« Le paradis a tué mon père; le village a emprisonné ma mère; que ton village crève! » (1, III p. 26), dit-il au chasseur.

Awa accepte de sauver le village. "La haine détruit, la main tendue efface la mort". La boue du village sera la bonne pâte pour modeler la reine.

Les dieux ont tranché. Le village de monstres connaîtra la résurrection, de nouveau la joie de vivre.

Abdou Anta Kâ ne s'attarde pas outre mesure sur la force ou la faiblesse des divinités. C'est le village, autrement dit la communauté des hommes qu'il met en procès.

Il se sert d'une symbolique traditionnelle pour développer des thèmes universels. La vengeance poursuivant le crime, le Bien triomphant du Mal, grâce à une bonne et saine Justice, la justice divine qui rappelle à l'ordre des hommes en perdition.


La justice des humains ou la mise en examen de l'ordre né de la colonisation

Le théâtre africain contemporain, quand il était sous tutelle, au nom de la théorie de l'assimilation, avait participé à la croisade contre les forces jugées rétrogrades et qui empêchaient la marche de l'Afrique. Le colonisateur en s'installant a imposé son droit, s'érigeant en censeur des coutumes qui n'étaient pas compatibles avec sa propre civilisation.

L'ordre colonial établi met en cause le système des rapports de droit qui régissait la vie des hommes au sein de la communauté traditionnelle. Monsieur Thôgô-gnini est la représentation de l'état de dérèglement né de ce changement de structure sociale.

Dans la pièce, un être étrange armé de revolver et de fusil tue tout ce qui symbolise l'ordre ancien (Tableau III). Les valeurs traditionnelles deviennent des poids morts. Les personnages évoluent sans repères et expriment le malaise provoqué par ce désordre social. « Tout craque autour de nous. Tout ce qui est sûr, certain, solide ne l'est plus. Tout est chamboulé » se plaint N'Zekou (p. 33).

« Sait-on maintenant qui est ami, qui est ennemi, sait-on quel droit régit les hommes, les peuples depuis que les blancs sont entrés dans notre cité » se demande Le boy (p. 44).

« Qui se reconnaît dans ce grand vertige, ce branle-bas de combat pour vivre! » se lamente Bouadi (p. 111).

A ces hommes qui croyaient fortement à l'influence des génies, des morts, Le Blanc propose "un dieu terrestre, visible, tangible": Le dieu Argent. Sa nouvelle société va secréter une nouvelle classe, celle des parvenus, dont la devise est "Enrichissez-vous, chacun pour soi".

Monsieur Thôgô-gnini le représentant de cette classe est un personnage aux instincts débridés, voleur, menteur, cupide. Il ne recule devant rien pour accumuler de l'argent. Il a le monopole de tout. Il s'est constitué un véritable empire financier en spoliant des milliers de petits exploitants agricoles.

Le nouvel ordre arrive avec un nouveau Droit qui ne se soucie ni de la morale, ni de la solidarité.

Il y a désormais des riches de plus en plus riches qui se croient au dessus de la loi et qui pensent pouvoir tout se permettre.

« Moi Thôgô-gnini, je ne suis peut-être pas aimé, mais je suis craint, respecté. Eh! oui, je puis impunément faire ce qui me plaît » (p. 39).

Il y a aussi des pauvres exposés à toutes sortes de tracasseries comme N'Zekou bousculé sans raison et arrêté pour résistance à agent dans l'exercice de ses fonctions.

Dans ce pays où "l'huile de palme a tout bouleversé" quel visage présente la justice ?

Le sixième et dernier tableau, intitulé Le Tribunal, est consacré au jugement de N'Zekou.

La première didascalie indique: « Le tribunal africain est en train de se calquer sur celui de l'Europe; la lente pénétration opère ses effets » (p. 83).

Les personnages sont ceux d'une cérémonie juridique de type occidental.

Le Président; Le greffier, l'huissier, le prévenu, les témoins, l'assistance.

Mais la scène n'est pas une reproduction parfaite d'une cour classique. Au regard de l'acte d'accusation: "atteinte par parole à l'honneur d'un homme important, chef de bande, vol, assassinat, enlèvement de femmes et d'enfants", N'Zekou aurait dû comparaître devant une cour d'assises.

L'audience est ici à juge unique comme on en voit dans les Tribunaux d'instance ou Justice de paix à compétence étendue. Le prévenu ne bénéficie d'aucune assistance. Le personnage de l'avocat n'apparaît nulle part dans la pièce.

Le prévenu comparaît à la barre enchaîné.

Le Président durant toute l'audience ne cesse de rappeler aux justiciables la haute idée qu'ils doivent se faire de la justice même s'il le dit très souvent sur un ton burlesque.

« Le char de la justice passe en laissant des traces nettes. »

« La justice ne frappe qu'à bon escient, après maintes réflexions »

« Quand la justice passe, toutes les chaînes s'inclinent ----- ou alors la justice ne serait plus la justice »

« La justice est anonyme, souveraine, elle n'a partie liée avec personne »

« La justice est droite, elle n'est pas du côté du cœur mais du côté de la raison, du côté droit."

Pour la recherche de la vérité, le tribunal s'appuie sur les preuves matérielles et les témoignages. Monsieur Thôgô-gnini parvient à détruire la preuve en arrachant à N'Zekou la reconnaissance de dette portant sa signature et à suborner les témoins.

Mais la vérité se manifestera tout de même. La solennité des lieux, la dignité de l'institution perturbent le témoin Fakron qui craque. « Oui, Monsieur le Président --- devant vous, j'ai peur --- La justice est tellement respectable, Sauvez-nous de Thôgô » (p. 102).

Le Président, devant l'évidence, libère N'Zekou. En rendant justice, le Président semble avoir dérangé un système. Il en a conscience. Son geste apparaît comme un sacrifice.

« Voici mes mains, voici mon cou, voici mes pieds, chargez-les de toutes les chaînes ».

A qui s'adresse le Président de la cour ?

Qui peut sévir contre un Président parce qu'il a le droit et qu'il a tranché selon son intime conviction ?

Le déroulement du procès révélera au grand jour les entraves de la liberté, c'est le mal vivre dans cette société où toutes les valeurs ont disparu.

L'auteur du désordre, c'est Thôgô-gnini. "C'est à Thôgo-gnini qu'il faut mettre les chaînes. C'est lui qu'il faut juger". Le peuple réclame justice mais Thôgô-gnini peut-il être jugé ? Le système qu'il incarne a déjà posé ses pénates et pour longtemps.

« Avec mon monocle, mon panama, ma canne, je suis l'image de demain ---, un demain impitoyable » avait-il prédit (p. 40).

Ce demain c'est le triomphe de l'individualisme, l'avènement d'une société où l'homme ne pense qu'à lui même, où il exprime sa liberté en vivant parmi les autres comme s'il était seul au monde.

La communauté politique qui se forme se dote d'instruments juridiques propres. Mais la civilisation qui s'impose comme la civilisation universelle a du mal à digérer les usages issus des traditions islamo-animistes.

L'attitude des justiciables face au rituel de la prestation de serment nous en donne la preuve.

Fakron, au lieu de lever la main droite, dit: « Monsieur le Président, je suis musulman, je ne jure que sur le Coran, je ne connais que la vérité du Coran. Mon Dieu est le Dieu du Coran » (p. 97).

Lat DIOR dira à peu près la même chose dans Le Procès de Lat Dior « En fait de Serment, je n'en connais de valable que celui fait sur l'honneur ou sur le Livre sacré ---. Alors pour simplifier les choses, pourquoi ne me feriez-vous pas juger sur le Coran ? » (p. 20)

Dans Le procès de pilon, la prestation de serment crée un incident.

Témoin Abi Faye : Au nom de Dieu

Président : Le nom de dieu n'a rien à faire ici. Dites seulement "je le jure"

Un assistant : Comment pouvez-vous rendre une bonne justice qui ignore Dieu ?

Président : Sortez-le

Ibra Faal : (en sortant). De toute façon je préfère quitter ces lieux d'où Dieu est absent (Il récite le Coran) p. 35.

Peut-on rendre une saine justice quand le Droit africain repose sur des principes étrangers ? Ousmane GOUDIAM qui fut procureur général près la Cour suprême de son pays tente une réponse dans le Procès du pilon : Malang Dramé est charlatan. Depuis quarante ans, c'est-à-dire depuis le temps colonial, il exerce la profession de déceleur de vol. Il opère au moyen d'un pilon porté par trois personnes. Sollicité par la coopérative du village de Jaawle qui a perdu de l'argent, le pilon de Malang désignera Serigne Makodu et Sengaan Juuf comme les auteurs du vol. Malang sera cependant arrêté et jugé pour dénonciation calomnieuse.

Le Président notifie à l'avocat que le procès de Malang n'est pas le procès de la nouvelle société mais celui de celle qui se meurt.

L'Afrique moderne qui use d'un droit positif tributaire de l'Occident juge l'autre Afrique, celle des fétiches, des Djinns et des sorciers.

La juridiction mise en scène au Tableau IV a la configuration du Tribunal correctionnel compétent pour connaître des délits. Les protagonistes sont : le président de la Cour, le procureur de la République, l'avocat de la défense, l'huissier, le prévenu, l'interprète, les témoins, l'assistance.

Le schéma d'intervention des personnages reproduit le déroulement de l'audience d'un procès classique.

Le procureur entre dans la salle

Le président dit à l'huissier d'appeler les affaires inscrites au rôle

Désignation d'un interprète (le prévenu ne parle pas français)

Vérification de l'identité du prévenu

Interrogatoire du prévenu

Prestation de serment des témoins

Déposition de la partie civile

Plaidoirie de la défense

Le Président lève l'audience après avoir mis l'affaire en délibéré.

Rendre justice, c'est permettre la manifestation de la vérité, mais ici le prévenu et le juge n'ont pas la même perception de la réalité.

« Monsieur le Président, demande Malang, quel rapport y a-t-il entre votre vérité et la mienne ? Entre votre école et la mienne ? » (p.35)

Le procès tourne autour de cette différence de perception.

La première affaire inscrite au rôle est celle de Moodu Faal accusé d'avoir tué la jeune Yaasin. C'est lors d'une cérémonie de nëp (vaudou) que l'homme a été reconnu comme dêm (mangeur d'âme).

Malgré le témoignage de Faatu Sise sa compagne qui sous serment affirme avoir entendu Moodu dire alors qu'il dormait profondément « C'est moi - c'est moi qui ai mangé Yaasin. C'était une dette. Ils m'ont ravi mon unique enfant, je me suis vengé » (p. 3), la Cour est embarrassée. Le Procureur demande de libérer Moodu puisqu'il n'y a eu ni violence, ni voie de fait sur la jeune fille. Le Président renverra l'affaire en attendant les conclusions du médecin légiste.

Le Droit fondé sur la raison cartésienne est-il capable de juger sereinement des faits relevant de l'Afrique mystique ?

L'histoire du pilon pour le procureur est une habile machination.

Malang est un trouble-fête qui a créé le désordre dans le village par des pratiques diaboliques qui dépassent l'entendement.

« Cela, notre Droit ne peut l'admettre, sous peine de reculer. Cela, notre justice ne peut s'en accommoder sous peine d'être inhumaine » (p. 53).

Le Procureur exige une application rigoureuse de la loi, une loi dont le caractère rationnel, laïque, moderne, progressiste est consacré par la Constitution votée par le peuple.

La fonction du Procureur est de défendre la Société. Ici il défend la Société contre elle-même.

(Dans le conflit qui l'opposait aux dieux, l'évolué était détruit s'il refusait la soumission ou le compromis). Devant le tribunal des humains, l'intellectuel affranchi demande une sanction exemplaire pour mettre définitivement fin à ces freins socioculturels et libère le peuple.

Mais la réalité n'est pas aussi simple. S'il n'y a aucune référence à ces pratiques dans la Loi inspirée de l'Occident et "La jurisprudence conforme à celle de la Cour d'Appel de Paris" (p. 41), elles n'en sont pas moins des conceptions fortement ancrées dans la mentalité collective.

L'évolué ne croyait pas aux fétiches et souhaitait leur disparition.

L'intellectuel affranchi croit au pouvoir du pilon. C'est cette hypocrisie qui est le vrai facteur de désordre. Le fauteur de trouble, ce n'est pas Malang. Ce sont ceux-là qui demandent la destruction des fétiches et qui les consultent le soir pour obtenir une guérison rapide, un emploi, un portefeuille ministériel, etc. Malang est au contraire un régulateur de la société, un facteur d'équilibre et de santé morale.

Faut-il alors condamner Malang ?

L'Afrique que l'on croyait à l'agonie est donc toujours présente et elle vit en chacun de nous.

L'affaire sera mise en délibéré.

C'est en possession de toutes ses facultés mentales, contrairement à Sarzan, que l'Avocat Maajor, vêtu de sa robe, se mêle à la danse de l'assistance heureuse de la libération de Malang, l'homme au pilon.

Le droit africain peut bel et bien reposer sur des principes étrangers à condition que ces principes ne soient pas restitués tels quels mais que les Africains trouvent en eux-mêmes les ressources pour les repenser, les transformer et les adapter.



L'Histoire à la barre : Le tribunal de la Postérité

Le conflit entre les dieux et les humains a été largement exploité par le théâtre africain contemporain, le plus souvent pour montrer le caractère obscurantiste des croyances ancestrales.

Quand le théâtre s'insurge contre l'ordre colonial, qu'il affirme sa volonté de corriger l'image déformée du passé, il nous donnera la preuve de l'existence d'institutions judiciaires et de techniques juridiques traditionnelles qui faisaient juger les hommes coupables d'infractions par leurs semblables.

Dans Une Hyène à jeun, Samory Touré fait juger son fils Diaoulé Karamoko par un tribunal dont il désigne lui-même les membres.

La mentalité juridique du Wassoulou est saisie dans son évolution. Une grande importance est accordée à la parole proférée par le chef. Le parjure est la pire des forfaitures.

C'est parce qu'ils refusent le parjure l'un et l'autre que Samory et son fils entrent en conflit.

Le droit d'aînesse régit les rapports sociaux mais Samory change le code de la succession. Il remplace la coutume anté-islamique où le cadet héritait sans partage de son aîné par la loi islamique. Ainsi le successeur de l’Émir sera un de ses fils au lieu de son frère. C'est par un vote cependant que sera désigné le successeur de l’Émir. « Cinq chefs de guerre auront à choisir le successeur de l'Emir du Wassoulou » (p. 29).

Lorsque, de retour de France, Diaoulé Karamoko commet la faute de dire "une vérité plus grave qu'une erreur", c'est un Haut Tribunal militaire qui le jugera.

L'audience a lieu à huis clos. "La scène se passe sous la tente de Diaoulé Karamoko, les juges forment un cercle autour de Diaoulé Karamoko" (p. 99).

L'audience débute par des questions de procédures, manœuvre dilatoire de nature à indisposer le Tribunal. Après s'être assuré que l'accusé jouit de toutes ses facultés mentales, la Cour lui notifie l'acte d'accusation avant de lui donner la parole pour sa défense. Il ne bénéficie pas de l'assistance d'un avocat mais un des juges, en l'occurrence son frère, fera tout pour le sauver, à telle enseigne qu'il est rappelé à l'ordre par Malinké Mory qui fait office de Président.

« Je voudrais savoir une fois pour toutes si le prince Sarankegni Mory est un membre du tribunal ou le défenseur de son frère » (p. 101).

La condamnation est mise aux voix. Trois juges déposent leur sabre à la droite de Malinké Mory qui y ajoute le sien.

L'action en justice s'est d'abord effectuée par la médiation. Mais Morifing Dian et Tassili Magan échoueront dans leur entreprise.

Dans le dispositif juridique en vigueur, il était prévu la grâce accordée par le souverain.

« Tu peux peut-être commuer cette sentence de mort en disgrâce. La loi islamique et nos coutumes le permettent » (p. 108), plaide Morifing Dian. Mais sa demande de grâce est rejetée par l’Émir.

Le système juridique utilisé n'est pas présenté comme infaillible. Au contraire, Morifing Dian s'évertue à démontrer que le tribunal n'était ni impartial, ni indépendant.

La sentence a été trop sévère : « Depuis que nous punissons les traîtres, cette sentence est sans précédent » (p. 107).

A travers ce verdict, Morifing Dian perçoit la vengeance de Kémé Birama. La Cour était en effet à sa solde.

Samory en toute souveraineté pouvait casser le jugement sans en référer à personne, il respectera cependant l'autorité de la chose jugée, la condamnation ayant été décidée à la majorité. Le prophète a dit: « Là où est la foule, c'est là que se trouve Dieu. Il sera fait selon votre volonté. » (p. 39).

Une hyène à jeun est aussi le procès de l'Homme de pouvoir.

Samory avait pris seul la décision de céder la rive gauche du Niger aux Blancs. Cette erreur qu'il reconnaît est à l'origine d'un drame qui va perturber l'équilibre de l'armée donc du Wassoulou tout entier.

Samory ne sera cependant pas traduit en justice. A Fakrou qui lui dit que l'armée désapprouve le traité, il répond que l'armée n'a pas à critiquer ses décisions.

C'est Samory qui fait juger Diaoulé Karamoko, c'est lui qui rejette les recours et c'est lui qui diligente l'exécution.

Le souverain fait condamner un soldat accusé de trahison et de tentative de rébellion.

Le père demande de mettre rapidement fin au supplice de son fils.

La justice a frappé fort pour que l'armée divisée se réconcilie avec elle-même.

Deux Samory entrent en conflit; l'Homme de pouvoir et l'Humain.

Le conflit se termine par la mort de l'humain.

Le souverain échappe au tribunal des humains mais ne peut se soustraire à la justice de Dieu. L’Émir Samory, serviteur fidèle de Dieu, sait ce qui l'attend désormais lorsqu'il dit « Je suis promis aux flammes de l'Enfer » (p. 109).

Karamoko a été condamné par ses contemporains mais la Postérité le réhabilitera.

« Plus tard! Bien plus tard, des générations éloignées de nos préjugés condamneront un homme qui commanda que son fils fût emmuré pour avoir dit la vérité sans fard ».

La postérité s'érigera en Tribunal pour juger une autre grande figure de la résistance à la pénétration coloniale : Lat Dior.

Mamadou Seyni M'Bengue dansLe Procès de Lat Dior ne nous transporte pas au Cayor à la fin du XIX e siècle Il fait venir parmi nous les témoins et acteurs de la geste du Damel.

Le Tribunal de la Postérité qui juge Lat Dior utilise comme mode juridictionnel le Procès. C'est un jury d'honneur qui a les caractéristiques d'une Cour d'Assises.

Les pièces comprennent deux parties: la première est consacrée à l'audition du prévenu et des témoins, la deuxième au réquisitoire du Procureur, à la plaidoirie de l'Avocat de la Défense et à la lecture du verdict par le Président.

Les morts se présentent à la barre des vivants en se pliant aux exigences du présent.

Appartiennent au présent: le Président, le Procureur général, l'Avocat de la défense, le Greffier, les jurés, l'assistance.

Appartiennent au passé : l'accusé et les témoins, ceux de la défense et ceux de l'accusation.

Lat Dior rendait lui-même la justice quand il était au pouvoir. Une justice distributive qui choisissait ceux qui devraient bénéficier de la protection du Souverain. « La justice, Messieurs, je l'ai mille et une fois rendue au nom de mon peuple, pour son bien personnel et pour la grandeur du Cayor lorsque j'estimais nécessaire de protéger l'un ou l'autre contre leur ennemis du dedans et du dehors. Cela fait que je me place au-dessus de la justice. Les efforts de son action ne peuvent en conséquence s'exercer contre moi, ni maintenant, ni jamais » (p. 16).

Le souverain est au-dessus de la loi. Comme l’Émir du Wassoulou. Lat Dior exerçait un pouvoir absolu et exclusif. Cela est caractéristique du pouvoir traditionnel. Ce qui fait dire à Louis Koffi Amega que c'est l'apport occidental qui a permis les recours contre les actes de la puissance publique, le droit traditionnel ignorant les procédés de contestation (p. 59).

Lat Dior comparaît en tant que simple citoyen devant une juridiction qui garantit le contradictoire, veille au respect des droits de la défense, fait observer la contradiction.

Mais ce tribunal est exceptionnel. Il n'est doté d'aucun pouvoir coercitif. On y entre en homme libre, on en sort toujours en homme libre quelle que soit la sentence prononcée.

Le juge postérité est le seul vrai juge infaillible. Ses sentences sont sans appel. Le Tribunal de la Postérité devient donc le tribunal de Dieu.

Lat Dior à l'issue du procès est déclaré innocent, héros et martyr de l'indépendance.

En préservant la mémoire de Lat Dior de toute souillure, le juge postérité s'adresse à tous les hommes « afin que les peuples soient mieux gouvernés et ne subissent plus l'action funeste des mauvais bergers » (p. 22).

Cette mise en garde interpelle les princes du jour. Après l'euphorie de l'indépendance, l'ordre établi a été plus que jamais perturbé et cette fois à partir du sommet. La personnalité criminelle épinglée par le Théâtre africain contemporain sera l'homme du pouvoir lui-même.

Les États africains nouvellement indépendants ont opté pour le régime républicain dont la stabilité repose sur des textes réglementaires, législatifs et constitutionnels. L'ordre établi n'est garanti que si les tenants du pouvoir respectent ces textes. Leur violation conduit au pire désordre, car elle signifie la confiscation des libertés.

Maxime Ndebeka dans Le Président oppose un père à son fils.

Le fils représente la jeunesse, l'avenir, la postérité.

Pour le Président, "tout ce qui arrive dans la vie arrive justement" (5, II p.75).

Chaque homme mérite donc son sort, et chaque peuple son président.

Le fils qui avait foi en la nature humaine devient un étranger.

L'homme du pouvoir tue son fils pour consolider son pouvoir.

L'ordre dans lequel évolue le Président, c'est l'ordre du mal. C'est un monde où il y a une seule religion, un dieu unique : "Le Mal".

Dans un tel monde, l'idée de justice est inconnue. C'est un monde de violence, (or la justice, c'est la gestion des conflits par la parole, le dialogue et la persuasion)

L'ordre du mal, l'ordre de l'injustice et de l'impunité ne peut être détruit que par une rupture violente.

C'est ce thème que développe Cheick A. Ndao dans le livre L'île de Bahila.

L'île vit sous la dictature du général Amago, personnage mégalomane et sadique qui se croit tout permis. Son pouvoir est cependant ébranlé par une rébellion dirigée par Diego, chef militaire de la guérilla, et Pedro, le théoricien et l'intellectuel surnommé Pedro-La justice.

Amago pousse le cynisme jusqu'à organiser une grande cérémonie pour décorer Diego et l'exécuter ensuite. En lui épinglant les médailles il ironise.

« Pedro, je te décore au nom des droits de l'Homme, au nom de la protection de l'individu, au nom de la lutte contre l'odieuse torture, au nom des crimes à l'égard de l'humanité » (p. 51).

Mais, avant l'exécution de la sentence, les guérilleros prennent d'assaut le Palais. Le pouvoir change de main. Pedro, nouveau leader, met un accent particulier sur une application correcte de la justice.

« Nous n'avons pas le droit de suivre les traces de l'ancien dictateur en tuant sans jugement ».

Il s'oppose à ce que les paysans se fassent justice eux-mêmes et exige que les prisonniers soient remis aux autorités pour être jugés.

Contrairement à Diego et aux autres qui penchaient pour une liquidation totale et rapide des ennemis, il demande que les plaignants viennent déposer contre les sbires du dictateur.

Il s'en prend à Alphonso qui n'a pas su résister à l'instinct bestial qui l'a poussé à tuer froidement Amago. « Tu n'as pas le droit de tirer sur un homme sans défense » (p. 65).

Pedro refuse la passion aveugle, la vengeance sans discernement.

Il veut un monde de discipline dans la justice et la foi en l'homme.

« Le pouvoir est pomme de discorde, une braise qui couve dans les cendres de la haine. Je ne sers la révolution qu'autant qu'elle commence par respecter l'individu ».

Le fin de l'ordre du mal marque l'avènement d'un nouvel ordre qui garantit les libertés individuelles et collectives.


Conclusion

Le théâtre africain contemporain met en procès une société en pleine mutation.

Né sous la colonisation, il s'est dressé contre la vision jugée rétrograde d'un univers où la cohésion de la communauté primait le pas sur le respect strict du droit de l'individu. Dans cette société la justice était rendue par les Dieux à travers prêtres et devins ou par le Souverain placé au-dessus de la Loi.

Avec la colonisation l'Afrique calque son système juridique sur celui de l'Europe.

Sous le soleil des indépendances, pour citer Ahmadou Kourouma, les tribunaux au sein desquels la loi est appliquée, les textes utilisés par les juges se conforment au modèle de l'Ancien Maître. Les hommes jugent et leurs semblables et les dieux.

C'est sur le chemin de la liberté que le théâtre rencontre la justice. Il lève le voile - j'allais dire les rideaux - sur les abus et les insuffisances du système, la confiscation des libertés et l'instrumentalisation de la justice, si ce n'est son étouffement pur et simple.

Le tribunal des Dieux, dans le Théâtre africain contemporain, c'est la révolte contre l'ordre traditionnel, le tribunal des humains, la mise en examen de l'ordre né de la colonisation, le Tribunal de la postérité, c'est l'histoire à la barre.

Le Théâtre africain contemporain accorde donc une place de choix à la justice et cet intérêt est loin de s'estomper.

Un nouvel ordre politique s'installe à l'échelle planétaire.

Il est de plus en plus question de mondialisation, de globalisation. Cet ordre est en train de phagocyter l'ordre démocratique en élevant au rang de divinité le Tout puissant Marché.

Quelle sera la figure de la justice dans ce système qui oppose souveraineté nationale et ingérence internationale, lorsque, face au monolithisme mondial, nous assistons à l'émiettement des structures sociales locales avec comme corollaire la résurgence des archaïsmes, l'exacerbation des conflits identitaires ?

Le champ d'investigation du Théâtre africain contemporain pour l'instauration d'une justice neutre, impartiale, indépendante est immense, le théâtre qui s'interroge sur le devenir de l'homme et de la société, qui exprime la liberté en action, principe et moyen d'un ordre toujours à créer et à assumer.


BIBLIOGRAPHIE

I Pièces de Théâtre

DADIE Bernard : Monsieur Thôgô-gnini, Présence africaine 1970

DIABATE Massa Makan : Une hyène à jeun, Hatier 1988

DIAKHATE Lamine : Sarzan, Traits d'Union n° 7, 1955

DIOP Birago : L'os de Mor Lam, NEA, 1977

FOFANA Moctar : L'appel du Fétiche, TU n°9, 1955

GOUNDIAM Ousmane : Le procès du pilon, NEA, 1980

KA Abou Anta : La fille des Dieux, P. A, 1972

KABULA Lukonzola : A quand le procès ?, Ed. universitaires africaines, Kinshasa 1994

KAYOR Franz : Les Dieux trancheront, Oswald, 1971

LETEMBET-AMBILY : L'Europe inculpée, CLE, 1907

MATIP Benjamin : Le jugement suprême, Ed. du Peuple afric. 1963

MBENGUE Mamadou Seyni : Le procès de Lat Dior, RTJ 1972

MIKANZA (M.M.K.N.) : Procès à Makela, Édit Presses afric.,, Kinshasa

NDAO Cheick : L'île de Bahila, P. A, 1975

NDEBEKA Maxime : Le Président, L'Harmattan 1982

L’Éducation africaine : Sokamé, n° 90-91

L’Éducation africaine : Le retour aux fétiches délaissés, n°90-91,1936-37


II Ouvrages et articles

AMEGA Louis Koffi : Bilan de l'évolution du Droit en Afrique, in Réflexions sur la première décennie des indépendances en Afrique noire,Présence africaine N° Spécial 1971

CISSE Moustapha : Du Théâtre négro-africain, TU n°3, 1974

DUVINMAUD Jean : Sociologie du Théâtre, PUF, Paris 1965

KA Abdou Anta : Passé et Présence du Théâtre africain, TU n°10, 1955

HERAUD Alain et

MAURIN André : Institutions judiciaires, Sirey 1998

MOURALIS Bernard : L'Ecole William Ponty et la politique culturelle, in Actes du colloque sur le Théâtre négro-africain (15-29 avril 1970) PD 1971

N'DIAYE Amadou : L'urne et le glaive, Jamana, Bamako, 1997.


 

Accréditation OING Francophonie

Sommaire des Actes de la XVIIIe Biennale

SOMMAIRE

XVIIIe Biennale de la langue à Ouagadougou 1999

L'expression du droit. Le français, langue africaine et internationale.

La jurisfrancité. Le Burkina-Faso et la francophonie


Préface de Roland ELUERD

Remerciements de Roland ELUERD


SEANCE SOLENNELLE D'OUVERTURE

Allocution de Roland ELUERD

Allocution d'Hélène GUILLERMOU

Allocution de Jeanne OGEE

Discours de bienvenue de Filiga Michel SAWADOGO

Allocution de S. E. Maurice PORTICHE

Discours solennel d'ouverture de S. E. Youssouf OUEDRAOGO

Message de Sheila COPPS

Message de René MONORY

Message d'Anne MAGNANT

Message de Stelio FARANDJIS

Message de Franck BOROTRA

Allocution de Marcel BEAUX

Message de Jacques LEGENDRE


I L'EXPRESSION DU DROIT

Le français, langue africaine et internationale

Jean CLUZEL

A. Le temps et l'espace

Jean-Claude TAHITA

Albert DOPPAGNE

Yvaine BUFFELAN-LANORE

Ouango Paul ZEMBA

Paul SABOURIN


B. Les domaines et les nouvelles technologies

Edmond JOUVE

Pierre LERAT

Jean-Paul BUFFELAN-LANORE

Karl CROCHART


C. La jurisfrancité

Shaheda PEEROO

Pierre DECHEIX

Michel DOUCET

Alain A. LEVASSEUR

Alain LANDRY

Floiran TAVARES

Ridha MEZGHANI


D. Expressions littéraires du droit

Oumar KANOUTE

Mariana PERISANU


II. LE BURKINA FASO ET LA FRANCOPHONIE

A. Structures institutionnelles

Paul Ismaël OUEDRAOGO

Baba HAMA

Salaka SANOU

Urbain AMOA

Herman ZOUNGRANA

Patrick BERGEN

Jean R. GUION

Simon COMPAORE


B. Langues, littératures et enseignement

Michel TETU

Lise SABOURIN

Alain VUILLEMIN

Gisèle PRIGNITZ

Youssouf OUEDRAOGO

Auguste Robert NEBIE


C. Table ronde «La littérature burkinabè: présence de l'oralité, place dans l'enseignement »

Jacques CHEVRIER

Alain Joseph SISSAO

Joseph PARÉ

Louis MILLOGO

Maître Titinga Frédéric PACERE


Discours de clôture de Roland ELUERD

Vœux de la XVIIIe Biennale

Liste des participants


A la Une

« La culture suppose l'enracinement, la profondeur et la perspective d’un épanouissement sans cesse en progrès. »

Jacqueline de ROMILLY

Présidente d’Honneur de la Biennale de la langue française (2002-2010)

Dans Le Trésor des savoirs oubliés, Éditions de Fallois, 1998, p. 93