Biennale de la Langue Française

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Accueil Les actes du 7ème Colloque 7ème colloque Saholy LETELLIER et Françoise BOURDON
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L’USAGE DU FRANÇAIS ET L’ECHANGE CULTUREL ET LINGUISTIQUE A TADIO, MADAGASCAR

S. Letellier et F. Bourdon

ARGUMENTAIRE :


«  L’usage du français et l’échange culturel et linguistique à Tadio » c’est-à-dire en milieu rural nous permet de nous ouvrir à d’autres savoirs, à d’autres savoir-faire.

Dans ce village, situé au centre de Madagascar, la création récente d’un musée sur les deux guerres mondiales ainsi que son école « l’école de la vie et de la paix » et d’une maison des femmes artisanes, valorisant le travail artisanal des femmes lié notamment au raphia, contribuent très largement à aider à la pratique du français et à faire connaître Tadio dans le monde francophone.

On s’interrogera sur la façon dont ces villageois, grâce à différentes actions menées, peuvent, quel que soit leur niveau d’études, apprendre le français, participer, contribuer à l’échange culturel et linguistique.

Comment les villageois à travers leur quotidien, leurs activités pratiquent-ils leur langue maternelle et apprennent le français ?

Comment les maîtres d’écoles enseignent-ils le français ?

Comment les visiteurs du musée peuvent-ils s’investir et enrichir les échanges ?

Comment une école en Normandie, dans un esprit de partenariat, participe-t-elle à l’échange culturel et linguistique ?

A travers l’apprentissage des recettes de cuisine, la lecture de contes, le théâtre, la poésie, les ateliers du musée, les villageois dans leur langue maternelle et en français nous font découvrir des potentialités pédagogiques et culturelles du plurilinguisme, souvent méconnues ou ignorées.

Cela s’est traduit par une réalisation concrète : la création de trois ouvrages «  La vie quotidienne à Tadio. L’apprentissage du français à Madagascar », « Echange culturel et linguistique entre Tadio (Madagascar) et Le Houlme (France) et «  Portraits de femmes à Tadio, à Antananarivo et en Normandie ». Ces ouvrages qui révèlent des pratiques innovantes, sont aussi l’occasion de découvrir et de partager une richesse commune, la langue française. Ils offrent aussi l’opportunité de rendre hommage à de belles personnes qui représentent la mémoire de temps difficiles et des valeurs fondamentales.


Communication 29 septembre 2018 :


Introduction :

Madagascar, l’Ile rouge, est le plus grand pays francophone de l’Océan Indien. La Grande Ile a accueilli en novembre 2016, le Sommet de la Francophonie.

Le pays a connu, depuis plus de cinquante ans, le phénomène de mélange de cultures et de langues. Ce phénomène, au gré des contextes, a évolué laissant une large place à l’usage du Français.

Certaines langues étrangères ont fait ou font leur chemin depuis une quarantaine d’années : le russe qui a presque disparu, l’anglais, l’allemand, le japonais et enfin le chinois. Toujours est-il, le français est la deuxième langue officielle après la langue malgache.1 Il est utilisé dans le système malgache de communication, d’administration et d’enseignement. Par ailleurs, les Institutions françaises telles que l’Alliance française, l’Institut Français, les écoles, les lycées et les collèges français contribuent à la promotion de la langue française. Ainsi, les enfants et les jeunes malgaches de milieux aisés fréquentent ces établissements ou sont membres des Alliances françaises, de centres culturels français.

Mais si cette promotion du français est réelle dans les villes, qu’en est-il dans les campagnes ?

L’exemple de Tadio,2 un village dans les rizières, situé au centre du pays est présenté ici. Notre propos est de nous interroger, à travers l’exemple de Tadio, sur la pratique du français en milieu rural et sur les apports culturels et linguistiques instaurés par les échanges établis avec des villageois et leurs enfants. Nous ferons part ici de nos observations et des expériences que nous avons menées à Tadio.


I. La langue française à Tadio : état des lieux

La présence du français à Madagascar remonte à la colonisation (1896-1960).

A. Les représentations du français

Si une très faible minorité considère que le français est une langue coloniale ravivant de douloureux souvenirs, une très forte majorité de villageois pense que le français est la langue du prestige, la langue qui fait partie de l’histoire même de Tadio. Preuve en est, nombreux sont les natifs de Tadio qui ont quitté le village pour la capitale ou « Andafy » c’est-à-dire à l’extérieur, à l’étranger et qui ont réussi. Ils ont l’estime de tous. On cite aussi et surtout les tirailleurs malgaches natifs de Tadio, la localité de Tadio fait partie des cinq plus importants lieux d’origine des tirailleurs pendant les deux grands conflits mondiaux. Les villageois se souviennent, encore aujourd’hui avec émotion, des tirailleurs lettrés qui écrivaient du front à tout le village pour donner les nouvelles et qui écrivaient à la place de leurs camarades analphabètes.

Aujourd’hui, le français est la langue que l’on aimerait parler, maîtriser, car aux yeux des villageois, ceux qui parlent français pourront avoir une belle carrière professionnelle, réussir dans la vie, aller loin.

On peut s’interroger sur le degré de maîtrise du français par les villageois. On constate que les villageois comprennent un peu le français et le parlent un peu ou pas du tout. Ils parlent entre eux et avec leurs enfants, dans la langue ethnique « le betsileo », certains parlent ou comprennent la langue malgache officielle (celle des Merina). L’élite du village composé de médecins, d’officiers militaires à la retraite et d’enseignants sont les seuls à maîtriser le français. Ils considèrent le français comme une langue d’ouverture sur le monde francophone.


B. L’usage du français à l’école et l’accès à l’enseignement

Le français occupe une place majeure dans l’enseignement. En primaire, en collège et en lycée, le programme est en malgache et en français ; à partir de l’Université, il est en français. A Tadio, il n’y a pas d’établissement français, pas d’école d’expression française, seulement trois écoles primaires (Izavona, Mpatora, Tsararivotra). Pour le collège et le lycée, il faut aller à Fandriana (7km de Tadio) et pour l’Université3, à Fianarantsoa.

A Tadio, dans les trois écoles primaires qui sont des établissements publics, c’est la langue malgache qui prévaut. Le programme est en malgache sauf pour l’enseignement du français mais l’enseignant peut faire ses cours en français et en malgache.4 En réalité, la qualité de l’enseignement en général, et celle de l’enseignement du français en particulier, est étroitement liée au niveau d’étude de l’enseignant lui-même, à son diplôme. Ainsi, dans les établissements publics malgaches, le brevet des collèges ou le niveau brevet suffit pour enseigner à l’école primaire ; le baccalauréat pour enseigner au collège (en milieu urbain) et au lycée (en milieu rural). Par ailleurs, on constate que les enseignants en milieu rural bénéficient de moins de formation que leurs collègues en ville. Ils sont très demandeurs auprès des touristes et les sollicitent surtout pour avoir un dictionnaire, un ouvrage bilingue, la méthode Boscher. A la demande des enseignants de Tadio mais aussi dans plusieurs contrées de l’île, nous leur concevons, pour les différents matières, des fiches pédagogiques sur mesure.

Du côté des élèves, poursuivre les études à partir du collège est donc onéreux. C’est pourquoi, beaucoup d’enfants à la campagne arrêtent leurs études en fin de cycle primaire. L’éloignement est le principal frein à la poursuite des études. La situation des filles se pose également. En effet, la fréquentation de l’école par les filles est moindre par rapport à celle des garçons. De même, rares sont celles qui peuvent aller au collège.


II. La pratique du français dans le village de Tadio et les échanges culturels et linguistiques

L’usage du français et l’échange culturel et linguistique à Tadio  c’est-à-dire en milieu rural nous permet de nous ouvrir à d’autres savoirs, à d’autres savoir-faire.

Ainsi, il serait intéressant de s’interroger ici sur les moyens mis en œuvre pour pratiquer le français dans ce village, un village où les trois écoles primaire n’ont pas de bibliothèque, où les enseignants eux-mêmes n’ont pas de matériels pédagogiques.

L’exemple présenté ici est celui mené dans le village de Tadio à partir de nos observations et des actions concrètes que nous menons depuis plus de trente ans.

A. Des pratiques innovantes

A travers de nombreux apprentissages : les recettes de cuisine, la lecture de contes, le théâtre, la poésie, le chant, les discours, les ateliers du musée, les villageois dans leur langue maternelle et en français nous font découvrir des potentialités pédagogiques et culturelles du plurilinguisme, souvent méconnues ou ignorées.

En premier lieu, dans les deux langues français et malgache, les cours d’alphabétisation pour adultes destinés notamment aux femmes du village, avec comme supports les recettes de cuisine permettent un apprentissage plus facile. Puis, les lectures publiques de contes, de romans, toujours dans les deux langues sont très appréciées. Les femmes viennent volontiers écouter en apportant leurs ouvrages qu’elles réalisent sur place (paniers, sac en raphia…). Les concours de chant sont aussi très prisés.

Quant aux enfants, les cours d’alphabétisation destinés aux enfants non scolarisés, généralement des filles, sont des activités d’apprentissage à la lecture à partir de fiches pédagogiques faites sur mesure. Autre activité proposée dans le cadre de la francophonie, des concours de poésie avec récitation et illustration de poèmes. Des concours ont été organisés à maintes reprises avec l’alliance française à proximité du village (7 km).

Ce sont des pistes d’apprentissage possibles et toutes ces pratiques sont très simples. Nous verrons que cet apprentissage est beaucoup plus aisé avec des ouvrages qui traitent du quotidien même des villageois, des ouvrages qui parlent de choses connues.


B. la création d’un premier livret pour répondre à une demande.

Nous sommes parties d’une demande : celle des parents d’élèves et des enfants et leur souhait d’avoir un livre sur leur vie quotidienne, sur leur village.5 Un livre qui permettrait aux enseignants d’enseigner le français et aux enfants de mieux apprendre et d’avoir leur propre livre. Ainsi, les enfants ont étroitement collaboré au projet et à sa réalisation. Ils sont les auteurs des dessins et des commentaires. L’ouvrage présente le village et la vie quotidienne à Tadio : les maisons traditionnelles, les travaux des champs, les plantes médicinales, l’artisanat des femmes, les danses traditionnelles, l’école, l’église, le retournement des morts…

Ce livre a été traité comme un carnet de voyage : l’objet devait être attrayant et ludique.

Nous avons opté pour des pages colorées dans la palette de Madagascar sur lesquelles les dessins des enfants se détachent en blanc. Le thème de la page est indiqué dans une étiquette.

Pour la pêche, par exemple, un pêcheur à la ligne dessiné par un enfant illustre et personnalise la page qui présente trois photos de scènes de pêche.

Le commentaire a été prononcé spontanément par un des enfants, nommé, à qui l’on a présenté en amont une maquette de l’ouvrage. Cette méthode a favorisé la pratique du français, renforcé leur intérêt pour le livre ainsi que la fierté d’être associé à sa création.

L’ouvrage, présenté dans plusieurs établissements scolaires à Madagascar et en Normandie, a suscité un vif intérêt. Un échange culturel et linguistique s’instaure tout naturellement entre les écoles primaires à Tadio et l’école du Houlme en Normandie. Un second livre voit rapidement le jour avec la collaboration de tous les enseignants et de leurs élèves.


III. Faire connaître le village dans le monde francophone

Dans ce village, la réalisation d’ouvrages francophones et la création récente d’un musée sur les deux guerres mondiales ainsi que son école « l’école de la vie et de la paix » contribuent très largement à aider à la pratique du français et à faire connaître Tadio dans le monde francophone.

Ces réalisations concrètes s’inscrivent totalement dans la démarche actuelle de la Francophonie : à savoir « parfaire l’intégration de tous les pays francophones dans une mondialisation plus heureuse en favorisant la paix, un développement responsable et le respect de la diversité culturelle ».

Le livre « La vie quotidienne à Tadio » s’inscrit, à son modeste niveau, dans cette démarche concrète et accessible à des villageois en milieu rural en leur parlant de ce qu’ils vivent et les impliquent. Les textes sont en français et les mots clés en malgache.

Nous découvrons qu’il existe fort peu de livres en français sur Madagascar sur place et en France, ce qui limite beaucoup les échanges. Tadio situé au centre du pays dans une région magnifique mais difficilement accessible serait encore plus ignoré sans l’action permanente de Saholy Letellier au service des populations. Cela a renforcé notre projet de création de livres.

Nous parlons bien ici d’un échange d’expérience et l’accueil de ces ouvrages en France suscite autant d’enthousiasme qu’à Madagascar ! De la surprise aussi en découvrant la beauté des paysages, la grande pauvreté ou les cérémonies traditionnelles comme le retournement des morts qui suscite étonnement et réflexion sur la relation aux défunts et à l’au-delà.


A. la participation à la diffusion du français et la réalisation d’autres livres

A la suite du premier livre, un second livre témoigne d’une belle coopération et d’échange au-delà des frontières entre les enseignants et les élèves à Tadio et au Houlme en Normandie.

Ce deuxième ouvrage6 est un livre surtout destiné aux enseignants avec des fiches pédagogiques sur des thèmes choisis par l’équipe enseignante des deux pays : les animaux, les expressions, l’eau, les mathématiques, la Géographie des deux pays, l’histoire pendant les Deux Guerres mondiales (en particulier sur le musée de Tadio et la vie quotidienne au Houlme). L’ouvrage comporte une fiche par niveau, de la première année de l’école primaire à la dernière année. Les thèmes cités sont abordés en parallèle et illustrés tout au long du livret.

Le second livre fait à la demande des enseignants, est réalisé dans l’esprit du premier: pages colorées et étiquettes signalétiques qui traitent un même thème parallèlement dans les deux pays. La problématique d’un même sujet apparaît alors très différemment selon que l’on parle de Tadio ou du Houlme.

Toutefois, nous choisissons cette fois un format différent, celui plus grand d’un cahier scolaire. Cela permet de rendre plus visibles les photos et les textes et de travailler confortablement.

La question de l’eau est assez représentative de nos différences.

Ainsi, à Tadio où les infrastructures sont inexistantes, nous choisissons de représenter l’eau à l’état naturel : les rizières, les puits qui contribuent à la beauté des paysages montrent les efforts que fait la population pour accéder à l’eau. Au Houlme, des statistiques de consommation, la description du réseau hydraulique, le cycle de l’eau : une approche très technique dont nous ne sommes même pas conscients tellement nous sommes habitués au confort de l’eau courante dans nos pays développés.

Un troisième livre est en cours de préparation : « échange culturel et linguistique : actions de femmes francophones ». 7

L’idée de poursuivre avec un troisième livre s’enchaîne et nous pousse à aborder un thème très actuel qui est celui de la place des femmes dans la société à Tadio et en Normandie. Des mamans, des commerçantes, des coiffeuses, des artisanes, des cuisinières, des élues… seront interrogées dans les deux territoires afin de croiser des portraits de femmes, de favoriser une prise de conscience et d’élargir notre regard. Ce travail n’a jamais été fait à Tadio et sera abordé avec beaucoup d’humilité.

Un autre livre «  Visage Nord Sud »,8 un recueil de poésies, en cours de publication, permet une ouverture internationale. Dans le cadre d’un projet international, des enfants de Tadio ont participé avec des enfants du Liban, du Luxembourg, de France et aussi d’autres enfants de la capitale malgache à l’illustration de vingt-cinq poèmes. L’auteur, David Chan,9 étudiant en Lettres à l’Université de Rouen Normandie, a sollicité l’association normande «  Education et Culture pour tous » pour l’aider à publier son premier recueil de poésies. Ainsi, l’association et ses partenaires (dont fait partie le Musée de Tadio) ont fait illustrer les poèmes par des enfants de 4 à 16 ans issus de quatre continents. La poésie est un langage universel et les travaux sont éloquents. La page de couverture a été illustrée par un enfant de Tadio.


B. La promotion du musée de Tadio et de son école

La création d’un musée à Tadio, « le Musée des Deux Guerres, Musée Johanesa Rafiliposaona », un des lieux les plus connus d’origine des tirailleurs malgaches pendant les deux guerres mondiales, a permis aux hommes et aux femmes du village de Tadio d’accéder à la culture chez eux, d’organiser des événements et faire connaître le musée.

Ce musée sur les deux guerres est un musée en partage qui dépasse le cadre de la francophonie. Le musée, inauguré dans l’année du centenaire de la Première Guerre mondiale (août 2014), a été construit par vingt-six paysans qui se sont activés pendant une année pour bâtir, leur musée, c’est-à-dire une maison traditionnelle malgache à base de terre battue et de bouse de vache. L’objectif du musée est de favoriser l’accès à la culture des enfants des paysans et d’apporter un développement culturel, socioéducatif et économique dans la région. Au musée, les ateliers en famille favorisent le partage d’un accès à la culture destiné à tous. Egalement, la participation de l’association des femmes du village aux montages des expositions du musée (fabrication de panneaux en raphia, aide à la réalisation des expositions…) est une façon, pour les villageois, de s’approprier le musée et leur histoire.

Depuis sa création, le musée organise des événements locaux (organisation de visites pour les villages environnants), régionaux (organisation de séminaires sur l’éducation, accueil d’artistes en résidence) et internationaux (organisation de deux colloques internationaux francophones «  Commémorer 1915-2015 : traces mémorielles et acteurs des conflits », colloque sur le centenaire de l’entrée en guerre de Madagascar » , « Enseigner la Grande Guerre » et de séminaires francophones. Des manifestations qui ont le soutien de l’Ambassade de France à Madagascar et du Partenariat Eurafricain.

Le Musée de Tadio a son école « l’école de la vie et de la paix ». L’école du musée propose des ateliers aux jeunes (découverte des objets et des documents des deux guerres mondiales), des cours d’alphabétisation aux adultes, des cours de formation notamment en français aux maîtres des écoles primaires, encadre des stages d’étudiants sur le patrimoine (ISTA ou Institut Supérieur de Technologie d’Ambositra à Fandriana, INTH ou Institut National du Tourisme et de l’Hôtellerie à Antananarivo…) et mène des actions sociales (achat d’une vache laitière pour un orphelinat, de pirogues pour des villages de pêcheurs…).

Un atelier au Musée avec le CSF  (Cercle des Solidarités Francophones) a été une expérience très enrichissante. Les enfants du village de 5 à 12 ans très curieux de nous rencontrer et d’échanger avec nous, nous attendent dans un petit kiosque situé dans le jardin du musée. Nous leur présentons un ensemble de livres de l’Ecole des Loisirs amené de France et nous commençons à découvrir ensemble les histoires et jolies illustrations. L’attention est incroyable, les regards et les sourires en disent long sur le plaisir qu’ils prennent à cet instant de partage. Nous ne ressentons aucune différence avec d’autres ateliers que nous avons pu mener en France avec d’autres jeunes enfants.

Une autre séance a été consacrée à la peinture. Là encore, un échange très joyeux s’instaure spontanément. Le vocabulaire et les expressions appropriés fusent. Un interprète est là en cas de besoin. Lors d’une petite exposition présentée aux villageois et au public de la conférence, les enfants montrent leur fierté d’avoir vécu cette expérience nouvelle pour eux. Des liens de confiance se créent et cela déclenche l’idée de créer un premier livre pour eux dont ils seraient aussi les acteurs.


Conclusion .

L’usage du Français en milieu rural est un fait significatif dont les impacts sont observables. Il permet de s’ouvrir à d’autres cultures, à d’autres savoirs, à d’autres savoir-faire.

Pour mieux comprendre le monde rural et faire des actions qui répondent véritablement aux demandes des villageois, les initiatives comme celles réalisées par Saholy Letellier depuis trente ans sont exemplaires. Celles-ci, soutenues par le CSF et par d’autres organismes et institutions tels que l’Ambassade de France à Madagascar et en Macédoine, la Région de Normandie, le Partenariat Eurafricain et la Biennale de la langue française, nous invitent à mener des actions concrètes qui ont du sens pour les populations.

A Tadio, trois ouvrages ont été réalisés : «  La vie quotidienne à Tadio. L’apprentissage du français à Madagascar », « Echange culturel et linguistique entre Tadio (Madagascar) et Le Houlme (France) et «  Portraits de femmes à Tadio, à Antananarivo et en Normandie ». Ils révèlent des pratiques innovantes, sont l’occasion de découvrir et de partager une richesse commune, la langue française. Ils offrent aussi l’opportunité de rendre hommage à de belles personnes qui représentent la mémoire de temps difficiles et des valeurs fondamentales communes à toute l’humanité.


BIBLIOGRAPHIE

- AMOUZOU Essé, L’impact de la culture occidentale sur les cultures africaines, Collection Etudes africaines, Editions L’Harmattan, 190 p.

- BAVOUX C., Le français à Madagascar, Contribution à un inventaire des particularités lexicales, Bruxelles, De Boeck & Larcier, 2000, 212 p.

- BOURDON F. et LETELLIER S., La vie quotidienne à Tadio. L’apprentissage du français dans un village à Madagascar, Saint-Etienne du Rouvray, Ingénidoc et Musée de Tadio, Madagascar, 2016, 24 p.

- BOURDON F. et LETELLIER S., Echange culturel et linguistique entre Tadio (Madagascar) et le Houlme (France), Saint-Etienne du Rouvray, Ingénidoc et Musée de Tadio, Madagascar, 2017, 24 p.

- Etat de la Francophonie dans le monde, (Données 1995-1996 et 5 études inédites), Paris, La Documentation française, 1997, 631 p.

- RANAIVO F., La situation du français à Madagascar, in A. VALDMAN (dir.), Le Français hors de France, Paris, Champion, 1979, pp. 507-525.

- RANDRIAMAMONJY Fréderic, Ny Tantaran’i Madagasikara 1895-2002, Trano Printy Fiangonana Loterana Malagasy, Antananarivo, 2006, 503 p.

- RANDRIAMASITIANA G. D., Madagascar, in R.-Chauderson et D. Rakotomalala (dir.), Situations linguistiques de la francophonie. Etat des lieux, Québec, Agence Universitaire de la Francophonie, 2004, pp.173-176.


NOTES

1 A Madagascar, on compte 5 millions de francophones sur 21 millions d’habitants.

2 Tadio a 1000 habitants, une église, trois écoles primaires et un musée sur les Deux Guerres mondiales. Le village n’a pas de commerce.

3 L’Université de Fianarantsoa est à une journée de route de Tadio. Il faut donc louer une chambre sur place. Les parents fiers que leurs enfants aillent à l’Université vendent souvent une partie de leur troupeau pour financer les études supérieures.

4 A l’école primaire, l’enseignant enseigne en français et en malgache s’il maîtrise le français sinon il enseigne uniquement en malgache.

5 F. Bourdon et S. Letellier, La vie quotidienne à Tadio, Ingénidoc et Musée de Tadio, Sainnt-Etienne du Rouvray, 2016.

6  F. Bourdon et S. Letellier, Echange culturel et linguistique entre Tadio(Madagascar) et Le Houlme (France), Ingénidoc et Musée de Tadio, Saint-Etienne du Rouvray, 2016

7 F. Bourdon et S. Letellier, Echange culturel et linguistique : actions de femmes francophones (en cours de réalisation).

8 D. Chan, Visages Nord Sud, Callicéphale, préface et contribution de Saholy Letelllier, Strasbourg, 2018, (à paraître).

9 David Chan a eu deux prix au printemps des poètes à l’Université de Rouen (mars 2018) : le prix de la meilleure rime et le prix du public.

 

Accréditation OING Francophonie

Sommaire du 7ème Colloque

7ème Colloque international de la Biennale de la langue française
Paris, 29 septembre 2018

Bilinguisme, plurilinguisme : Pour quels objectifs ? Quels enjeux pour l'avenir ?

Programme

Christian TREMBLAY


Alexandre HOLLE


Marc DEBONO


Lilas AL-DAKR

Gilbert DOHO


Saholy LETELLIER et Françoise BOURDON


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« La culture suppose l'enracinement, la profondeur et la perspective d’un épanouissement sans cesse en progrès. »

Jacqueline de ROMILLY

Présidente d’Honneur de la Biennale de la langue française (2002-2010)

Dans Le Trésor des savoirs oubliés, Éditions de Fallois, 1998, p. 93