Biennale de la Langue Française

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Jean R. GUION

Président du Conseil international de solidarité avec le Burkina Faso (CISAB)

Président de l'Alliance francophone


BURKINA FASO Démocratie, justice et francophonie


« La mise en place d'un espace juridique francophone correspond initialement à la promotion de valeurs fondamentales, véritables enjeux pour la consolidation de l'État de droit, l'appui aux processus démocratiques et la promotion des Droits de l'Homme. Elle a par la suite, au fur et à mesure de l'évolution des relations internationales, été amenée à répondre à la nécessité de préparer et d'engager la Francophonie dans les défis nouveaux qui sans cesse se dressent et transforment les perspectives de développement »

Cette analyse du Haut Conseil de la Francophonie, dans son État de la Francophonie dans le monde (édition 97-98), présente l'idéal francophone de justice à la fois comme le socle nécessaire au développement, et comme un des éléments assurant à ce développement une connexion constante avec l'environnement dans lequel il s'inscrit.

Le développement et le progrès reposent, pour une grande part, sur la justice. Et la justice, pour la Francophonie, fait l'objet des plus importantes vigilances. Une justice imperméable aux bouleversements sociaux, économiques et scientifiques se trahit elle-même. La justice est à la fois transcendante et pratique, transcendante dans la mesure où elle apparaît constituer un ordre sublime et pratique, puisqu'elle pousse à apprécier, in concreto, des situations quotidiennes. L'absence au jugement de cette double référence mène à l'autoritarisme ou à l'obscurantisme. Nombre d'époques, nombre de régimes, ont illustré cette magistrale erreur, malheureusement encore vive.

La Philosophie des Lumières, véhiculée par cette langue française qui nous est si chère parce qu'elle touche à notre âme, insiste sur l'éducation et l'expérience pour ainsi dire vérifier la teneur des justices proposées, qui s'attachent autant à l'être qu'au devenir. Les deux sont indissociables.

La Charte de la Francophonie adoptée par le sommet d’Hanoï en novembre 1997 tire bénéfice d'une évolution depuis la Convention de Niamey de 1970 qui définissait l'idéal francophone en accordant à la "solidarité" une fonction fondatrice exclusive : avec la fin de la Guerre froide, le rapprochement des modèles de développement et bon gré mal gré la mondialisation de quelques échanges, puis des valeurs, l'idéal francophone dorénavant, depuis Hanoï, s'articule plus amplement : « Liberté et Droits de l'Homme, Justice et Solidarité, Démocratie, Développement et Progrès ». Une place fondamentale, on s'en rend compte, est désormais formellement reconnue au socle juridique dans la définition de cet idéal.

" Liberté, Droits de l'Homme, Justice et Démocratie " vont de pair avec " Développement et Progrès" , puisqu'ils en garantissent les conditions. Ils s'ajoutent à la " Solidarité " qui les prolonge.

De même, au premier rang de ses objectifs, la Francophonie recherche à aider " à l'instauration et au développement de la Démocratie, à la prévention des conflits, au soutien de l’État de droit et aux Droits de l'Homme. "

Par ailleurs, l'Agence de la Francophonie, opérateur des programmes que décide le Sommet, ajoute une coopération multilatérale " économique et juridique "; elle " appuie " les États membres dans leurs efforts pour la construction et pour l'approfondissement de l’État de droit et de la Démocratie, et oriente ses programmes " en vue du développement, du progrès et de l'essor économique. "

Dans les faits, la part croissante accordée à la justice par le monde francophone trouve un écho à ces résolutions. En effet, le Conseil de la Francophonie suspendit sa coopération avec le Niger à la suite de l'assassinat du président Ibrahim Baré Maïnassara le 9 avril dernier, réclamant " le rétablissement de l’État de droit et l'organisation d'élections dans les plus brefs délais. " Et l'Assemblée parlementaire francophone condamne le coup d’État militaire survenu le 30 avril aux Comores et apporte son soutien à l'Assemblée fédérale de la République islamique des Comores régulièrement élue et dissoute par les putschistes.

Rappelons que c'est à Dakar en 1986, premier Sommet organisé par un pays du Sud, que fut introduit le thème des " droits fondamentaux. " Le président Abdou Diouf y exprima clairement sa conscience positive :

« La Francophonie vient de s'ancrer dans le respect fondamental des libertés de l'Homme et des Peuples (...) elle se ressource ainsi aux idéaux les plus élevés de liberté et de justice. C'est le meilleur moyen de consolider le socle sur lequel est en train de prendre corps et vie le droit au développement. »

Il poursuivit :

«La Francophonie se fonde sur une communauté de valeurs et de langue, consacrée à la promotion de la paix, de la justice, de la sécurité, de la solidarité, de la démocratie, ainsi qu'aux respects des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, qui sont universels et inaliénables.»

Je suis parfaitement le président Abdou Diouf dans cette pensée. Et le droit, au travers des valeurs qu'il instaure ou réaffirme, est un élément d'ouverture indéniable vers la connaissance et l'exercice des droits ou libertés fondamentales, vers la participation démocratique du peuple à la gestion des affaires de la Nation, vers la sécurisation des échanges. Facteur donc de stabilité et de progrès, la justice dans l'idéal francophone concourt fermement au développement, en même temps qu'elle l'illustre.

Il est intéressant de porter nos regards vers l'expression de la Justice par des Républiques jeunes et constructives dans leur développement; je suis toujours surpris des enseignements que j'en retire sur la vigueur des idéaux francophones.

J'évoque ici notamment mes études et mes voyages au Burkina Faso.

Les expériences politiques qu'a traversées le Burkina Faso depuis son accès à l'indépendance offrent à l'analyse une succession rapide d'enchaînements réactifs . Ils se suivent en répondant aux excès du précédent par une avancée démocratique, parfois maladroite ou feinte, ou par des excès plus manifestes encore.

La Révolution du 4 août 1983 présente la particularité d'articuler résolument, après une série de coups d’État, une volonté idéale de justice populaire dans la pratique politique. Malheureusement, la personnalité même de Thomas Sankara, son amateurisme et sa démesure ont égaré et détourné cet élan : en témoignent les atteintes aux libertés d'association organisées par le CNR dans sa quête de mainmise totale et exclusive.

M. Kourita Sandmiti, dans son étude sur le syndicalisme et le pouvoir politique au Burkina Faso, estime même que la période 1983-1987 constitue « la période la plus sombre des Droits de l'Homme dans le pays.»

L'avènement de la Rectification par Blaise Compaoré, qui très tôt s'était désolidarisé de l'extrémisme de son prédécesseur, a permis au Burkina Faso d'à nouveau emprunter la voie de la démocratie et du progrès, en consacrant une attention particulière aux droits et libertés fondamentaux. En ce sens, Blaise Compaoré et le Burkina Faso aujourd'hui illustrent combien le sentiment de justice préside à toute œuvre nationale; ils illustrent, avant la lettre, la pertinence de l'idéal francophone réactualisé, ou revigoré, par le Sommet d’Hanoï dans ce qu'il accorde à la justice un rôle clef pour le progrès et le développement.

Le peuple burkinabè a toujours fait preuve d'exigence en matière de justice : sous l'empire des Mossi déjà, on constate que la justice était gratuite, la procédure simple et courte. Le système de dévolution du pouvoir y était relativement démocratique : le Morho Naba en effet, lié par la coutume, s'appuyait pour toute décision d'importance sur un conseil. Quant au mécanisme de désignation des chefs, il n'avait rien d'arbitraire et n'était pas systématiquement héréditaire. Marc Aicardi de Saint-Paul, dans son ouvrage De la Haute Volta au Burkina Faso, relève en outre que, loin de rejeter les indigènes, la civilisation Mossi fut assimilatrice; elle absorba les peuples conquis et les associa à la gestion du royaume.

Plus récemment, il convient de remarquer que les différents mouvements syndicaux, dans leurs préoccupations de justice sociale, ont bien souvent été à l'origine de l'évolution vers plus de démocratie. Ils se sont d'ailleurs attelés très tôt à défendre non seulement les intérêts des travailleurs, mais d'une façon plus générale les idéaux de la démocratie. Les événements qui ont marqué la fin du Renouveau national en font foi.

Ainsi, la vigilance des populations et son besoin d'équité ont, de tout temps, sollicité les gouvernants sur le plan de la justice, au mépris parfois d'une potentielle maturation du régime. Blaise Compaoré, lui, prolonge cette attente populaire vers des perspectives de construction démocratique et de progrès.

Le mouvement même de la Rectification doit être entendu comme l'amorce, salutaire, d'une politique de réconciliation et la fin de l'exclusivisme idéologique. M. Augustin Loada, en menant sa recherche sur l'architecture d'un nouvel ordre politique au Burkina Faso, l'explique : «Blaise Compaoré, en excluant du Front populaire l'aile gauchiste dure, du fait de l'hostilité de cette dernière à une politique d'ouverture et de compromis qui risquait d'amoindrir son pouvoir, opéra ainsi un élargissement décisif vers d'autres sensibilités, plus à même de représenter l'ensemble du tissu social. » Ce mouvement renoua le dialogue avec la société civile, notamment urbaine. Blaise Compaoré constatait d'ailleurs lui-même :

« Derrière un certain sectarisme, un certain gauchisme infantile, se cachait en fait une certaine lutte effrénée pour l'appareil d’État. »

L'engagement de la Nation vers la démocratie pouvait alors se poursuivre. La volonté ferme de mettre en place la quatrième République par la constitutionnalisation du régime, affichée clairement dès le premier congrès du Front populaire du 1er au 4 mars 1990, allait se déployer, en appelant l'ensemble de la Nation à participer aux travaux.

« Nous, congressistes réunis à Ouagadougou (...) donnons mandat à la Coordination et au Comité exécutif du Front populaire pour procéder à la formation d'une Commission constitutionnelle élargie à toutes les compétences et aux sensibilités politiques nationales, qui rédigera dans un délai de six mois un texte constitutionnel conforme aux réalités et aspirations de notre peuple. »

Des organisations et des structures membres du Front populaire, mais aussi non membres (citons ainsi le PAI), des syndicats, des ONG au rang desquelles le Mouvement burkinabè des Droits de l'Homme et des peuples, des communautés religieuses, des magistrats, des avocats et d'autres techniciens, constituèrent ainsi la Commission constitutionnelle. L'avant-projet de la Constitution fut déposé le 14 octobre 1990. Au mois de mai, le Front populaire, dont les statuts avaient été publiés dès le 10 mai 1988, se déconnecta de l'appareil d’État, dans la perspective du référendum constitutionnel du 2 juin 1991; tous les partis politiques burkinabès recommandèrent à leur membres l'adhésion, enthousiastes : ce jour-là, 93% des suffrages exprimés se prononcèrent pour le OUI. La quatrième République était née.

La Constitution consacre la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, et l'établissement du multipartisme. Le Président de la République est élu pour 7 ans au terme d'élections directes. L'Assemblée législative pour 4 ans. Le Président de la République désigne un premier Ministre, sujet à l'approbation de l'Assemblée nationale. La liberté de la presse et le liberté d'opinion notamment sont garanties. Remarquons d'ailleurs que, dès le 31 décembre 1990, une radio indépendante Horizons FM avait vu le jour à Ouagadougou.

L’État de droit ne cesse d'être approfondi depuis : une deuxième assemblée, la Chambre des Représentants, fut instaurée par une loi organique en 1993 et effectivement installée en 1995. Un Conseil économique et social, une Inspection générale de l’État, un Médiateur et un Conseil supérieur de l'information furent mis en place.

La Commission nationale d'organisation des élections, devenue la Commission électorale nationale, indépendante, contrôle la régularité des élections. Les premières élections municipales de l'histoire du Burkina furent organisées en février 1995, prolongeant ainsi une nouvelle organisation de l'Administration du territoire placée sous le signe de la décentralisation. Les deuxièmes élections législatives du 11 mai 1997 ont quant à elles confirmé la normalité de la première législature : 13 partis politiques y ont présenté leurs candidats. Enfin, la dernière élection présidentielle, en novembre 1998, a opposé trois candidats à la magistrature suprême. À cette occasion, les observateurs internationaux, qui complétaient le dispositif national du contrôle de la régularité des élections, ont fait part de leur approbation quant à la bonne tenue des scrutins.

Depuis l'arrivée de Blaise Compaoré à la conduite des affaires du pays, le cadre juridique s'est affiné et modernisé, cherchant à combler les vides qui amputaient la vie civile quotidienne et marquaient certains blocages étatiques : le Code des personnes et de la famille fut refondé dès novembre 1998, accordant à la femme une position plus libre et plus responsable. En août 1989, un kiti (décret) réglementa les loyers et la construction des maisons à usage d'habitation. Le 13 juin 1990, un Code de l'information fut publié, et connut une révision en 1993 en concertation avec les acteurs du secteur.

La loi du 14 décembre 1992 porte liberté d'association et celle du 23 décembre liberté de réunion et de manifestation sur la voie publique. La construction d'un nouveau studio à Ouagadougou et de 18 centres d'émission permettent dorénavant une couverture télévisuelle de plus de 70%, alors qu'elle n'était que de 20% en 1992. Une enveloppe budgétaire a été dégagée en 1997 pour la presse privée et reconduite depuis; on doit également prendre note de l'autonomisation des budgets des organes de presse depuis 1997.

Dans le domaine du système judiciaire, un code pénal moderne a été publié. De nombreux jugements rendus par les tribunaux populaires de la Révolution sans respect des garanties normalement octroyées à tout citoyen par les démocraties ont été repris. Des journées de sensibilisation à la justice et au pouvoir judiciaire ont été organisées, notamment la "Rentrée judiciaire" de novembre 1993. Une loi portant statut de la profession d'avocat et statut du cadre du personnel de justice ont permis aux professionnels du droit une plus grande aisance dans leurs initiatives. L'ouverture d'une section "Justice" à l’École nationale d'Administration et de la Magistrature, et un recrutement accru de magistrats et d'auxiliaires de justice, ont confirmé l'attention particulière du gouvernement à faire des droits et libertés fondamentaux une réalité constante et scrupuleuse.

Je voudrais d'ailleurs ici mentionner la récupération de la mort tragique de Norbert Zongo : des personnes politiques, heureuses d'apparaître, ont profité de l'affaire pour troubler l'opinion nationale et porté le discrédit sur le gouvernement en place. Ce dernier institua par décret une Commission d'enquête indépendante pour mener les investigations sur les causes du drame; le jour même de la réception du rapport de cette Commission, le gouvernement a procédé à sa publication puis l'a transmis sans délai à la justice pour les suites judiciaires à donner.

On ne peut se montrer plus soucieux de transparence, ni plus respectueux des procédures ! La CEI a, le 7 mai 1999, affirmé le caractère politique du crime de Norbert Zongo; elle a également vu son principal témoin à charge, Monsieur Belemkoagba, dénoncer les manipulations graves dont il avait été l'objet de la part de certaines personnes.

Par ailleurs, dans son message à la Nation du 21 mai 1999, Blaise Compaoré a fait part du dispositif exceptionnel mis en place afin de garantir une diligence particulière à l'affaire. Ainsi le magistrat qui a été saisi a été déchargé de toutes autres activités.

La garde présidentielle, mise en cause dans l'affaire David Ouedraogo, a été réorganisée et ses membres ne sont plus à l'abri de poursuites judiciaires. Dans ce même élan, un collège de sages a été appelé à examiner le problème des crimes impunis; ce dernier a déjà, le 14 juin, rendu ses premières recommandations.

Quelques journalistes, français notamment, en mal de sensationnel, restituèrent l'affaire Norbert Zongo d'une façon à tel point tendancieuse que les institutions burkinabè furent presque directement mises en accusation.

Ces journalistes, non seulement, n'ont aucune déontologie, en ce sens qu'ils ne vérifient pas les informations qu'ils relatent, mais en plus ils manifestent de façon outrageante une attitude discriminatoire, pour le moins peu honorable, à l'égard des institutions africaines. J'emprunterai pour clore cette parenthèse quelques mots de Monsieur Jacques Dufailly, magistrat français, de retour d'un voyage au Burkina Faso :

« Faut-il rappeler à nos médias que nous avons eu récemment, dans notre pays, plusieurs affaires qui n'ont pas été élucidées, dont un suicide au sein même de l’Élysée...Jamais il n'est venu à l'esprit de nos médias d'insinuer que la responsabilité de ces disparitions et suicides pouvait être imputée aux Présidents ou Autorités de la République...»

Au niveau de l'Administration, là encore, des mesures ont été prises pour pallier certaines injustices qui avaient hypothéqué de façon importante la vie de la Nation. Le régime sankariste avait en effet licencié des milliers de fonctionnaires, dont des enseignants, sans comprendre que la lutte contre les " ennemis de classe " avait des limites. En 1992, en février et en septembre, des décrets introduisirent une réhabilitation administrative, réparant ainsi nombre de situations intolérables.

Mais la justice et la démocratie ne se limitent pas à l'instauration des mécanismes et de l'arsenal juridique d'un État de Droit. Le premier ministre Mulroney résumait cette idée de façon dynamique:

« Les droits de la personne, c'est aussi le droit au développement économique et social, source d'émancipation et de liberté. La personne humaine, pour être à la fois le bénéficiaire et l'artisan du développement, doit avoir la liberté d'être et d'agir. »

Or c'est précisément dans cette optique que s'inscrit la somme d'efforts consentis ces dernières années.

Sur le plan économique tout d'abord : depuis la naissance de la Société Burkinabè des chemins de fer en juillet 1988, que de chemin parcouru vers l'instauration d'un système où tous peuvent entreprendre! Au mois d'octobre 1989, le premier Plan d'Ajustement structurel a engagé le pays dans une série de mesures et de responsabilités importantes afin d'orchestrer les potentiels nationaux vers plus de liberté et en définitive plus de rendement.

Les Assises sur l'économie de 90 et 94 et les Assises des états généraux sur l'emploi de 96 ont permis une diffusion des enjeux et des défis auprès de la population, tout en octroyant à cette dernière la possibilité nouvelle d'exprimer ses doléances.

Le monde artisanal et l'économie informelle n'ont pas été en reste : les SIAO, les travaux de la Direction de la promotion du secteur informel et l'aide octroyée par le biais du Fonds d'appui au secteur informel en témoignent.

À une échelle plus vaste encore, la sécurisation des champs économiques a été décisive : en effet, cette nécessité d'assurer la sécurité des investissements et des transactions a conduit le Burkina à s'engager activement au sein de l'Organisation pour l'Harmonisation du droit des affaires en Afrique. L'avènement du code des investissements, du code des impôts et du code minier participent à cet élan porteur. Par ailleurs, le processus de privatisation amorcé en 91 a conduit à la déconnexion de l’État et des grandes entreprises nationales, dans un double souci : aménager un espace entrepreneurial obéissant aux strictes lois du marché, et tracer une frontière hermétique entre intérêts particuliers et étatiques.

Le Forum Franco-Burkinabè des hommes d'affaires qui s'est tenu le 25 janvier 1996 a insisté sur cette donne. Dans le monde agricole, on ne compte plus les initiatives destinées tant à l'amélioration des conditions des travaux et des productions qu'à la valorisation du monde rural en général : organisation des journées du paysan, opération 3000 charrues en avril 93 et opération 1200 tracteurs en juin 98, distribution de semences, expériences visant à privilégier les cultures les plus rentables, constructions de barrages...

Sur le plan social, là encore :

La Conférence nationale du mouvement scolaire de mars 89 a permis de dresser les insuffisances des années précédentes, et de sensibiliser les enseignants et les parents à l'importance fondamentale du rôle joué par l'école.

En septembre 94, les états généraux de l’Éducation ont balisé l'orientation et les innovations en matière d'éducation; une loi d'orientation sur l'éducation votée par l'ADR en mai 96 a confirmé concrètement les décisions prises. En plus des dons de matériels et de livres aux écoles, des solutions alternatives ont été dégagées : écoles satellites, centres d'éducation de base non formelle. En 97, un Forum national sur l'enfant africain s'est tenu et, en juin de la même année, un Parlement des Enfants a été symboliquement instauré.

La politique en faveur des femmes doit aussi être relevée :

Dès 1988, un programme a été élaboré pour conduire à l'alphabétisation de 10 000 femmes. Par la suite, des opérations de sensibilisation visant à l'accroissement du taux de scolarisation des femmes et l'élargissement du champ d'accès aux connaissances ont été conduites : Journées internationales de la femme en mars 93, Conférence régionale des femmes africaines ministres et parlementaires à Ouagadougou.

Parallèlement et conjointement, la mise en place d'un dispositif intégrant la femme à la vie économique s'est organisé : Atelier national des femmes à Koudougou en juin 94, décentralisation des structures de crédit afin que les femmes de toutes les contrées du Burkina puissent y accéder, accès plus aisé aux formations techniques et professionnelles, instauration dès 91 d'un fonds d'appui aux activités rémunératrices des femmes dont le taux de recouvrement avoisine d'ailleurs les 93%, constitution de centres de production pour jeunes filles...

Mise en place d'un encadrement juridique digne des démocraties modernes, sécurisation et libéralisation des champs productifs et des échanges, avancées sociales concrètes et motrices : voilà en quelques mots l'action de Blaise Compaoré depuis son arrivée à la magistrature suprême du Burkina Faso.

Conscient de la nécessité d'une dynamique qui réponde à la fois au long terme et au quotidien, le Président de la République du Burkina a parfaitement conjugué cohésion sociale et dialogue. Cette attitude, cette réussite, n'en déplaise à certains, procède d'un idéal de justice tourné vers des réalisations effectives.

Dans l'éditorial de la Gazette de la presse francophone de mai-juin 1999, Philippe Bilger a mis en avant la nécessité d'une double « bonne gouvernance » : une bonne gouvernance économique et financière, et une bonne gouvernance morale, fondée sur les Droits de l'homme. Après s'être interrogé sur « l'hémiplégie » qui semble toucher l’État africain, « qui tente d'être bon gestionnaire mais fait fi de l'humanisme et de l'éthique dans le domaine de la pratique gouvernementale et des libertés publiques », l'auteur salue la réponse apportée à cette double exigence par le Burkina Faso.

Pour conclure cette intervention, je me permettrai d'emprunter sa conclusion :

« Le Burkina Faso (...) a voulu lutter contre le risque d'hémiplégie que j'évoquais plus haut. Qu'on ait imposé à l’État d'agir de la sorte ou qu'il l'ait décidé importe peu. Ce qui compte, c'est qu'un chemin est emprunté qui peut faire de ce pays, lentement, douloureusement peut-être mais sûrement, un modèle africain sur tous les plans. »

 

Accréditation OING Francophonie

Sommaire des Actes de la XVIIIe Biennale

SOMMAIRE

XVIIIe Biennale de la langue à Ouagadougou 1999

L'expression du droit. Le français, langue africaine et internationale.

La jurisfrancité. Le Burkina-Faso et la francophonie


Préface de Roland ELUERD

Remerciements de Roland ELUERD


SEANCE SOLENNELLE D'OUVERTURE

Allocution de Roland ELUERD

Allocution d'Hélène GUILLERMOU

Allocution de Jeanne OGEE

Discours de bienvenue de Filiga Michel SAWADOGO

Allocution de S. E. Maurice PORTICHE

Discours solennel d'ouverture de S. E. Youssouf OUEDRAOGO

Message de Sheila COPPS

Message de René MONORY

Message d'Anne MAGNANT

Message de Stelio FARANDJIS

Message de Franck BOROTRA

Allocution de Marcel BEAUX

Message de Jacques LEGENDRE


I L'EXPRESSION DU DROIT

Le français, langue africaine et internationale

Jean CLUZEL

A. Le temps et l'espace

Jean-Claude TAHITA

Albert DOPPAGNE

Yvaine BUFFELAN-LANORE

Ouango Paul ZEMBA

Paul SABOURIN


B. Les domaines et les nouvelles technologies

Edmond JOUVE

Pierre LERAT

Jean-Paul BUFFELAN-LANORE

Karl CROCHART


C. La jurisfrancité

Shaheda PEEROO

Pierre DECHEIX

Michel DOUCET

Alain A. LEVASSEUR

Alain LANDRY

Floiran TAVARES

Ridha MEZGHANI


D. Expressions littéraires du droit

Oumar KANOUTE

Mariana PERISANU


II. LE BURKINA FASO ET LA FRANCOPHONIE

A. Structures institutionnelles

Paul Ismaël OUEDRAOGO

Baba HAMA

Salaka SANOU

Urbain AMOA

Herman ZOUNGRANA

Patrick BERGEN

Jean R. GUION

Simon COMPAORE


B. Langues, littératures et enseignement

Michel TETU

Lise SABOURIN

Alain VUILLEMIN

Gisèle PRIGNITZ

Youssouf OUEDRAOGO

Auguste Robert NEBIE


C. Table ronde «La littérature burkinabè: présence de l'oralité, place dans l'enseignement »

Jacques CHEVRIER

Alain Joseph SISSAO

Joseph PARÉ

Louis MILLOGO

Maître Titinga Frédéric PACERE


Discours de clôture de Roland ELUERD

Vœux de la XVIIIe Biennale

Liste des participants


A la Une

« La culture suppose l'enracinement, la profondeur et la perspective d’un épanouissement sans cesse en progrès. »

Jacqueline de ROMILLY

Présidente d’Honneur de la Biennale de la langue française (2002-2010)

Dans Le Trésor des savoirs oubliés, Éditions de Fallois, 1998, p. 93